Après l'utilisation lundi du 49.3 par Michel Barnier pour faire adopter le budget de la Sécurité sociale, les députés entendent voter une motion de censure ce mercredi pour faire tomber le gouvernement. En cas de démission, qui pourrait remplacer le Premier ministre ?
Avec la menace d’une motion de censure, les pronostics vont bon train. Lundi, le Premier ministre a engagé la responsabilité de son gouvernement sur le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) en enclenchant l’article 49.3 de la Constitution. Une décision qui a poussé les partis de l’opposition comme La France Insoumise et le Rassemblement national à déposer une motion de censure.
C’est d’ailleurs le député LFI et président de la commission des finances de l’Assemblée, Eric Coquerel, qui portera ce projet contre le gouvernement Barnier, dont la durée de vie pourrait être la plus courte de l’histoire de la Ve République.
Si une motion de censure était adoptée - 289 voix sont nécessaires -, le Premier ministre devrait alors donner sa démission et gérer les affaires courantes jusqu’à la nomination de son successeur, sauf si Emmanuel Macron le renomme et qu'il accepte d'être reconduit. Un casse-tête pour Emmanuel Macron, qui selon de nombreuses publications multiplierait les contacts avec de potentiels chefs de gouvernement.
Sébastien Lecornu
Selon les informations de RTL, le nom du marconiste Sébastien Lecornu est régulièrement cité pour remplacer Michel Barnier. «Il faut trouver un profil élastique, capable de rassembler les LR, les macronistes, sans se faire censurer par le RN», a estimé le journaliste politique Gauthier Le Bret dans l'émission d'Europe 1 «On marche sur la tête». Le Ministre des Armées «a déjà vu Marine Le Pen, il traite le RN, il ne le méprise pas. Et on sait combien c'est important pour elle», selon le journaliste politique.
Issu de la droite, proche d'Emmanuel Macron et tour à tour secrétaire d'État auprès du ministre de la Transition écologique et solidaire, ministre délégué en charge des collectivités territoriales ou ministre des Outre-mer, Sébastien Lecornu détient le record de longévité au côté du chef de l'Etat.
François Bayrou
«Il est favorable à la proportionnelle, c'est un argument pour le Rassemblement national», a déclaré ce mardi Gauthier Le Bret à l'antenne de CNEWS. De son côté, RTL avance que le maire de Pau aurait été reçu par Alexis Kohler, secrétaire général de l’Élysée. En 2022, il avait parrainé Marine Le Pen lors de la présidentielle. «Il coche beaucoup de cases», a ainsi confié un élu de droite au micro de RTL.
En février dernier, François Bayrou avait refusé d'intéger le gouvernement de Gabriel Attal faute d'«accord profond sur la politique à suivre». Toutefois, trois jours après la nomination de Michel Barnier en tant que Premier ministre en septembre, l'édile a déclaré que si on lui avait confié Matignon, il aurait accepté la proposition, mais le président du MoDem défendait la nomination de Bernard Cazeneuve à l'époque.
Roland Lescure
Vice-président de l'Assemblée nationale, Roland Lescure est également cité par les experts pour occuper le poste de Premier ministre. En 2017, il se lance en politique sous les couleurs d'En Marche. Toutefois, comme pour Sébastien Lecornu et François Bayrou, ce type de profil pourrait être un «défaut», d'après une source de RTL.
Alors qu'Emmanuel Macron avait affirmé vouloir «la stabilité» politique en France, Roland Lescure a qualifié Marine Le Pen ce lundi sur Franceinfo de «Machiavel aux petits pieds qui joue avec la signature de la France sur les marchés financiers», estimant qu'il «va sans doute falloir changer l'équation politique» en parlant «avec la gauche raisonnable».
Bruno Retailleau
De son côté, La Tribune Dimanche évoque l’hypothèse très incertaine de nommer l’actuel ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau. «Le locataire de l'Elysée juge le ministre de l'Intérieur, qu'il ne connaissait pas auparavant, très fiable et respectueux des institutions», a ainsi glissé l’un de ses interlocuteurs.
Pourtant adversaire d'Emmanuel Macron, Bruno Retailleau, patron des Républicains au Sénat, s'est retrouvé propulsé au gouvernement à l'âge de 63 ans après une carrière en tant que représentant de la droite conservatrice, «mais les macronistes et notamment l'aile gauche ne l'accepteraient jamais» en tant que Premier ministre pour Gauthier Le Bret.
Bernard Cazeneuve
Ce n'est pas la première fois que le nom de l'ancien Premier ministre sous François Hollande est encore cité pour ce poste. En effet, beaucoup de macronistes, surtout issus de l’aile gauche, trouveraient son gouvernement plus stable que celui de Michel Barnier.
Bernard Cazeneuve sillonait d'ailleurs la France encore en novembre pour rassembler ses soutiens, dont François Bayrou qui avait milité pour qu'il occupe Matignon. Seules les divisions à gauche - surtout au sein du PS et de La France insoumise qui s'étaient opposés à sa nomination cet été - pourraient freiner ses ambitions. D'autres en revanche, assurent qu'il pourrait attirer certains députés LR.
Michel Barnier
«Qui peut remplacer Michel Barnier ? Ça peut être Michel Barnier ! Rien n’empêche Emmanuel Macron de le renommer», a proposé l’ancien ministre et député EPR Éric Woerth, mais «les Français auraient l’impression qu’on s’assoit sur la censure de l’Assemblée», a raconté à RTL un visiteur de l’Elysée.
« Qui peut remplacer Michel Barnier ?
Ça peut être Michel Barnier !
Rien n’empêche Emmanuel Macron de le renommer » propose l’ancien ministre et député EPR Éric Woerth #MotionDeCensure #DirectAN #affaireconclue pic.twitter.com/PkaiqttJwl— Paul Larrouturou (@PaulLarrouturou) December 2, 2024
«La chute de Barnier est actée», avait assuré la cheffe des députés insoumis Mathilde Panot.
Nommé le 5 septembre, il aura tenu trois mois grâce au «soutien sans participation du RN» et, «ce qui le fera tomber, c'est justement que le RN aura cessé de le soutenir», a souligné le député PS Arthur Delaporte.