Le ministre de la Justice Didier Migaud était l'invité de la Grande Interview CNEWS-Europe 1 ce jeudi 14 novembre. L'occasion pour lui d'aborder de nombreux sujets (OQTF, narcotrafic...) même s'il a refusé d'évoquer le sort judiciaire de Marine Le Pen.
Le ministre de la Justice Didier Migaud était l'invité de la Grande Interview sur CNEWS et Europe 1 ce jeudi 14 novembre. Voici ce qu'il faut retenir des différentes thématiques qu'il a abordées.
Procès des assistants parlementaires du RN
«Vous savez que le garde des Sceaux n'a pas le droit de s'exprimer sur des affaires individuelles et à partir du moment où un procès est en cours. je suis pratiquement le seul responsable politique à ne pas pouvoir commenter», a déclaré Didier Migaud. Relancé sur le fait que Gérald Darmanin avait, lui, pris position, Didier Migaud a ajouté qu’il savait pertinemment qu’à partir du moment où il s’exprimerait, des commentaires seraient faits.
«Je ne peux pas m’immiscer dans un procès qui est en cours. La justice, elle est indépendante. Et les magistrats sont eux-mêmes indépendants. Et c'est un principe constitutionnel. Et le ministre peut définir une politique pénale, mais il n'a pas le droit d'intervenir dans des affaires particulières», s'est-il justifié.
Interrogé sur une phrase polémique qui aurait été prononcée par l’une des procureures en charge de l’affaire, Didier Migaud a précisé qu’il y avait des procédures qui pouvaient permettre de récuser un juge, de faire appel et que le conseil supérieur de la magistrature peut-être saisie. «Le justiciable a des droits et c'est heureux», a-t-il ajouté avant de certifier que ce cas méritait sûrement une instruction voir des vérifications.
la politisation la Justice
Une chose est sûre, pour lui, la justice ne doit surtout pas être politisée. «La justice, une fois de plus, applique le droit», a déclaré Didier Migaud. Concernant la politisation du syndicat de la magistrature dénoncée par certains cadres politiquies, il estime qu’il peut y avoir une liberté syndicale, «mais les magistrats, ensuite, dans leur travail, doivent se montrer indépendants de toute opinion politique».
Le ministre de la Justice est aussi revenu sur l’acte de barbarie commis par individu camerounais qui a récemment tué un SDF. Ce mercredi 13 novembre, Bruno Retailleau, avait déclaré que la France était trop protectrice pour ceux qui menacent les Français. «Je suis pour une extrême fermeté quand des personnes ne respectent pas les règles de la société et on doit être extrêmement sévères quant à ces comportements. La justice, là aussi, doit raisonner de façon objective. Vous avez une personne qui commet un délit, un crime, il doit être poursuivi et il doit être condamné et sanctionné. Le rôle de la justice, c'est à la fois de protéger les citoyens, c'est aussi de les sanctionner quand ils doivent l'être et de réparer aussi en accompagnant les victimes», a rapporté Didier Migaud.
Meurtre de Philippine
À propos du meurtrier de Philippine, libéré en septembre dernier alors qu’il faisait l'objet d’une OQTF, le ministre de la Justice a affirmé qu’il était envisageable que la loi change pour permettre au juge des libertés d'analyser à la fois les faits, mais également «de comprendre la personnalité de la personne en question et ce pourquoi elle a été condamnée».
«Il faut faire une distinction entre l'État de droit avec un certain nombre de principes qui s'appliquent à nous et qui sont protégés par la Constitution, qui sont dans la Constitution, qui sont protégés par le Conseil constitutionnel, qui sont protégés aussi par des conventions internationales signées par la France et l'État du droit qui peut effectivement être modifié», a déclaré Didier Migaud.
vers une evolution de la législation ?
En effet, pour lui, «les lois peuvent être ajustées». «Je ne suis pas contre, je l'ai dit, pour un certain nombre de dérogations concernant par exemple la justice des mineurs, on y reviendra peut-être tout en respectant l'État de droit. La justice des mineurs ne peut pas être la même que la justice des majeurs. Là, il y a un certain nombre de principes qui s'imposent aussi à nous. Mais dans un certain nombre de situations, des dérogations sont tout à fait possibles et j'y suis pour ma part favorable», a ajouté Didier Migaud.
«S'agissant de la criminalité organisée, on y reviendra peut-être, je suis là aussi pour une extrême fermeté, y compris dans la revisite d'un certain nombre de procédures. On s'aperçoit que dans un certain nombre de procédures, il y a des avocats qui abusent de ces procédures. Donc il faut pouvoir trouver les moyens tout en respectant bien sûr un certain nombre de principes, de faire en sorte qu'on ne dévoie pas les procédures», a-t-il précisé.
le laxisme de la Justice
Attaquée de toutes parts sur un prétendu laxisme de la justice française, le garde des Sceaux, a nié en bloc ces accusations. «Elle fait son travail. Je suis tout à fait conscient de l’opinion des Français à ce sujet. Mais lorsque vous regardez la durée moyenne des condamnations aujourd'hui, elle est supérieure à celle qui pouvait exister il y a quelques années. Il n'y a jamais eu autant de détenus dans les prisons. Il y a un vrai sujet d'exécution de la peine et d'un délai, parfois trop long, entre le prononcer de la peine et l'exécution de la peine. J’ai mis en place un groupe de travail», a rapporté Didier Migaud.
l'explosion du narcotrafic
En déplacement la semaine dernière, avec Bruno Retailleau, à Marseille, Didier Migaud a pu s'entretenir avec différents acteurs de la ville sur la criminalité organisée. «J’ai pu voir dans la criminalité organisée, sur les trafiquants de stupéfiants, combien les mineurs pouvaient être utilisés. Vous avez des pressions sur ces mineurs, des pressions qui sont exercées sur les familles. Vous savez, nous étions à Marseille avec le ministre de l'Intérieur. Nous avons des réunions de travail avec la police judiciaire, avec les magistrats, ce qu'ils nous remontent est horrible. Et nous avons changé de dimension au niveau de cette criminalité organisée, avec des délinquants qui utilisent la torture, la barbarie sur un certain nombre de personnes, sur les familles. On a changé de dimension. Donc, il faut que l'État s'arme davantage pour lutter contre cette criminalité organisée», a insisté le garde des Sceaux.
son action depuis sa prise de poste
En poste depuis le 21 septembre, Didier Migaud s'est défendu sur les actions qu'il a déjà entreprises. Pour lui «on ne peut pas considérer que (la montée des actes violents) est un problème gravissime et, dans le même temps, attendre le résultat de la loi. C'est pour ça que je mets en place, je renforce un parquet national qui existe. Je souhaite qu'il y ait une coordination nationale, je souhaite imposer les échanges d'information entre l'ensemble des juridictions. Il faut renforcer les moyens d'investigation, il faut renforcer les moyens de juger. Et il faut que ces criminels, lorsqu'ils sont condamnés, puissent être isolés dans des quartiers spécifiques, dans des cellules isolées pour qu'on puisse brouiller toute possibilité de discuter avec l’extérieur».