Un homme de 73 ans, victime de pédocriminalité dans l'Église, a bénéficié d’une réparation financière de 60.000 euros. Sexuellement agressé par un prêtre de ses 12 à 15 ans dans les années 60, il a ensuite été condamné pour pédocriminalité à plusieurs reprises à l’âge adulte.
Jean-Yves Schmitt, 73 ans, a été indemnisé de 60.000 euros pour des agressions sexuelles qu'il a subi dans les années 1960 dans un lycée de Bourg-en Bresse (Ain). Celles-ci lui avaient été infligées par le prêtre Félix Hutin, entre ses 12 et 15 ans.
Les faits étant prescrits pénalement, le prêtre avait été condamné au civil en juillet 2015 pour ces abus sexuels.
Mais dans sa vie d'adulte, Jean-Yves Schmitt a été condamné à plusieurs reprises pour des faits de pédocriminalité.
L'instance nationale indépendante de reconnaissance et de réparation (Inirr) a évoqué les conséquences «graves et durables» des abus sexuels sur l'agressé, devenu agresseur à l'âge adulte.
«L'agresseur reste responsable de ce qu’il a commis»
«Le comportement du prêtre et son emprise sur votre corps et votre esprit ont créé une sorte d’addiction qui a bouleversé vos repères et vous a laissé exposé à des désirs impossibles à assumer», a indiqué au pédocriminel agressé sexuellement dans son enfance l'Inirr, dans une lettre consultée par l'AFP.
«Ceux-ci vous ont conduit à des actes de violences, à franchir des interdits et à de lourdes sanctions judiciaires qui ont transformé votre vie professionnelle, personnelle et familiale», a ajouté l'instance créée en 2021 à la suite des chiffres chocs du rapport Sauvé sur la pédocriminalité dans l'Église catholique.
Toutefois, sa présidente a bien souligné que cette réparation financière ne déresponsabilise «en aucun cas» Jean-Yves Schmitt des actes pédocriminels qu'il a commis par la suite : «Un agresseur reste responsable de ce qu’il a commis quand bien même il a été victime», a-t-elle déclaré.
Mais l'Inirr prend «en considération toutes les personnes victimes» : «Cette personne a été victime et on ne peut pas faire comme si ce n’était pas le cas», a-t-elle expliqué.
«Si je n'avais pas été victime, je n'aurais pas été prédateur»
De son côté, le principal concerné a indiqué entendre que l'indemnisation d'un pédocriminel puisse «prêter à confusion».
«Mais il faut comprendre que tout vient du fait que j'ai été victime : si je ne l'avais pas été, je n'aurais pas été prédateur», s'est-il justifié. «Cela ne me rendra pas mes années perdues ni mes petits-enfants, que je n'ai pas vus depuis leur naissance», a-t-il déploré.
Selon l'Inirr, les situations similaires à celles du septuagénaire sont marginales, et ont concerné 6 cas sur les 679 décisions prises par l'instance depuis sa création.
Au 12 juillet 2024, 1.453 victimes au total ont saisi l'Inirr depuis 2021.