Le projet de loi sur la fin de vie arrive ce lundi 27 mai en première lecture à l'Assemblée nationale. Le texte a déjà subi quelques modifications en commission et divise jusqu'au sein de la majorité.
Les députés doivent discuter d'un sujet particulièrement sensible à partir de ce lundi et pour deux semaines. Le projet de loi sur la fin de vie arrive en effet en première lecture dans l'hémicycle de l'Assemblée nationale ouvrant la voie, à terme, à l'autorisation d'une «aide à mourir» pour la première fois en France.
Près d'un an après la fin d'une Convention citoyenne dédiée, Emmanuel Macron a présenté ses arbitrages sur ce sujet le 10 mars dernier. Il est question d'un «modèle français de la fin de vie» et surtout d'une «aide à mourir» permettant à certains patients de recevoir une «substance létale», selon des «conditions strictes».
La version gouvernementale du texte réserve en effet cette «aide à mourir» au malades atteints d'une «affection grave et incurable engageant leur pronostic vital à court ou moyen terme». Ils doivent également être majeurs, présenter une souffrance insupportable ou réfractaire aux traitements et être aptes à manifester leur volonté de manière libre et éclairée.
Après 100h d’auditions et de débats, la commission spéciale a voté le PJL Fin de vie. Il prévoit notamment le droit à une aide à mourir en cas d’affection grave et incurable en phase avancée ou terminale et de souffrances physiques et psychologiques réfractaires ou insupportables pic.twitter.com/496i7mRf8k
— Olivier Falorni (@OlivierFalorni) May 18, 2024
Plusieurs ploints-clé de la version d'origine ont toutefois été modifiés lors des débats de la commission spéciale à l'Assemblée. La députée Horizons Agnès Firmin-Le Bodo fait partie de ceux qui le regrettent : auprès du média l'Opinion, elle a estimé que «l'équilibre d'origine, celui du respect de la volonté des patients et de la place donnée aux professionnels de santé, a été rompu» par ces ajustements.
Celle qui avait participé à la rédaction du texte en tant que ministre de la Santé a notamment pointé la modification d'un critère d'éligibilité, puisque la mention du «pronostic vital engagé à court ou moyen terme» a été remplacée par la notion d'affection «en phase avancée ou terminale». Une initiative qui, selon Agnès Firmin-Le Bodo, «élargit» le nombre de bénéficiaires potentiels de l'«aide à mourir».
L'actuelle ministre de la Santé, Catherine Vautrin, désapprouve également ce changement et a déjà déposé des amendements dans le but de revenir à la version initiale. Mais d'autres, comme l'Association pour le droit à mourir dans la dignité (ADMD) ou le rapporteur du texte, Olivier Falorni (MoDem), sont à l'inverse satisfaits de cet ajustement. Ce dernier a balayé l'idée d'un «déséquilibre» du texte, expliquant que la suppression de cette mention tenait au fait que la notion de «moyen terme» est difficile à définir.
Une addition aux directives anticipées
Les directives anticipées ont également évolué puisqu'à l'initiative de Frédérique Meunier, des Républicains, les députés ont approuvé en commission l'idée qu'un malade puisse y intégrer le «type d'accompagnement pour une aide à mourir» souhaité, dans l'hypothèse où il perdrait «conscience de manière irréversible». Agnès Firmin-Le Bodo estime que cela introduit un «doute», même si le critère selon lequel le patient doit être «apte à manifester sa volonté de façon libre et éclairée» a par ailleurs été conservé.
Une troisième modification a été appliquée concernant l'administration de la substance létale. Le texte gouvernemental prévoyait qu'elle soit auto-administrée par les patients, à moins qu'il soient dans l'incapacité de le faire, mais un amendement de Cécile Rilhac (Renaissance) a ouvert aux malades la possibilité de déléguer ce geste à un tiers s'ils le souhaitent.
En dehors des divisions qu'elle suscitent au sein de la majorité, ces modifications ont ravivé l'hostilité des opposants au texte, parmi lesquels l'Eglise catholique et la Fédération protestante de France. Un collectif d'organisations soignantes a par ailleurs jugé que «la boîte de Pandore (avait été) ouverte».
Au cours du parcours législatif du texte, qui devrait se poursuivre jusqu'à l'été 2025 au moins, les députés devront aussi étudier un autre volet dédié aux soins palliatifs, pour lesquels la tendance est au renforcement.
Globalement, le projet de loi sur la fin de vie devrait trouver l'essentiel de ses soutiens à gauche et dans le camp présidentiel, mais les débats s'annoncent nourris puisque non seulement l'hostilité prévaut à droite et à l'extrême droite mais des voix discordantes se font aussi entendre dans les différents groupes.