C'était le journaliste de toutes les personnalités. Décédé ce mardi 3 octobre à l'âge de 86 ans, Jean-Pierre Elkabbach a interviewé de nombreux chefs d'Etat et parmi ses rencontres, celle avec Vladimir Poutine en 2014 reste mémorable. Notamment pour avoir abordé de manière prémonitoire la question sensible de l'Ukraine.
C'est l'une des interviews qui a marqué sa carrière. La rencontre avec Vladimir Poutine au Kremlin le 4 juin 2014 est restée gravée dans les souvenirs de Jean-Pierre Elkabbach. Le journaliste, décédé ce mardi à 86 ans, avait confié dans son ouvrage «Les Rives de la Mémoire» (éd. Bouquins 2022) les coulisses de cet entretien qu'il avait mené avec son confrère Gilles Bouleau au Kremlin.
Une interview où Jean-Pierre Elkabbach, présent pour Europe 1, avait abordé la question, déjà sensible, de l'Ukraine et ses frontières avec la Russie. A Vladimir Poutine, alors maître du Kremlin, le journaliste avait alors osé l'interroger sur la souveraineté de l'Ukraine.
Ce à quoi le président avait répondu : «bien sûr, nous reconnaissons la souveraineté de l'Ukraine. Nous aurions aimé qu'elle se sente elle-même comme un Etat souverain. Parce que la participation, à quelques blocs militaires que ce soit ou à une structure rigide d'intégration signifie la perte d'une certaine partie de sa souveraineté. Mais quand nous parlons de l'Ukraine et des blocs militaires, il est évident que cela nous inquiète. Parce que si par exemple l'Ukraine rejoint l'Otan, les infrastructures militaires de cette organisation vont se retrouvées à côté de notre frontière et ça nous ne pouvons y rester indifférents.»
Cinq mois de préparation
Une menace alors à peine voilée de la part de Vladimir Poutine, à une époque où son armée venait d'annexer la Crimée en mars 2014. Le président avait alors présenté sa vision du monde, une vision qui montrait son ambition de ne pas voir la Russie entourée par la puissance des Etats-Unis, alors dirigés par Barack Obama.
Dans ses mémoires, Jean-Pierre Elkabbach révélait que la question était délicate. L'interview avec le pensionnaire du Kremlin avait nécéssité cinq mois de préparation avec l'entourage du président, tandis que le journaliste avait dû se rendre par deux fois, sur place, à Moscou pour négocier le déroulé de cette interview rarissime pour la télévision française.