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Réforme des retraites : l'État condamné pour son fichage de manifestants placés en garde à vue lors de la mobilisation

L’accusation se réjouit de cette décision. [JEAN-PIERRE CLATOT / AFP]

Le tribunal administratif de Lille a ordonné vendredi au garde des Sceaux et au parquet de Lille d'effacer les données personnelles d'un fichier, recensant les gardés à vue lors de la mobilisation contre la réforme des retraites. Le tribunal condamne également l'État à verser une somme globale de 3.000 euros aux requérants.

Le tribunal avait été saisi en référé par l’Association de défense des libertés constitutionnelles (Adelico), le Syndicat des avocats de France et la Ligue des droits de l'homme (LDH), sur la base d'un article de Mediapart dénonçant la constitution d'un fichage de manifestants placés en garde à vue lors de la mobilisation contre la réforme des retraites.

Le juge des référés «estime que la constitution par le parquet de Lille, en dehors de tout cadre réglementaire, d’un fichier recensant les nom, prénom et date de naissance de chaque manifestant placé en garde à vue à l’occasion des manifestations contre la réforme des retraites, ainsi que les suites pénales données, porte une atteinte grave et manifestement illégale au droit au respect de la vie privée des personnes concernées, et ordonne l'effacement des données à caractère personnel qu'il contient», résume un communiqué diffusé par le tribunal.

Le ministère de la Justice a «pris connaissance» de la décision et «envisage actuellement les suites» à y donner, a-t-il déclaré à l'AFP.

«Ce tableau était seulement destiné à recenser l'identité des personnes placées en garde à vue» dans le cadre de la mobilisation contre la réforme des retraites, et les «suites judiciaires» données. «Il ne s'agit ainsi en aucun cas d'un tableau de manifestants mais de personnes mises en cause dans une procédure pénale», a également soutenu la Chancellerie.

Un «fichier politique»

L'avocat de l'Adelico et du SAF, Jean-Baptiste Soufron, a salué une décision «extrêmement importante», se réjouissant que «le tribunal administratif ait pu jouer pleinement son rôle de contrôle des décisions du gouvernement».

«Il est avéré qu'un fichier politique a été constitué par le parquet de Lille sur les instructions du ministère de la Justice», a-t-il souligné, déplorant que «le gouvernement, depuis plusieurs mois, enchaîne les décisions illicites».

«Il s'agit clairement d'un vrai rappel à l'ordre», s'est félicitée l'avocate de la LDH, Marion Ogier. Selon la LDH, le fichier a été constitué depuis le 17 mars, après le durcissement de la mobilisation après le recours au 49-3.

A l'audience, un représentant du ministère de la Justice avait assuré que ce fichier était autorisé par le décret encadrant la base Cassiopée, qui rassemble dans un logiciel sécurisé les données des prévenus, victimes ou témoins des procédures judiciaires des dix dernières années.

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