Elisabeth Borne s’est interrogée, ce mercredi 12 avril, sur les prises de position de la Ligue des droits de l'Homme (LDH) sur l'islamisme, ou encore sur Sainte-Soline, suscitant l’ire de l'association, qui n’a pas tardé à lui répondre, et un nouveau tollé à gauche.
«Des prises de position ambigües». Lors des traditionnelles questions au gouvernement, ce mercredi 12 avril, la Première ministre, Elisabeth Borne, a été interrogée sur la Ligue des droits de l’Homme (LDH), une association que Gérald Darmanin avait suspectée d’avoir des positions ambiguës sur l’islamisme ou encore sur les événements de Sainte-Soline.
«J'ai beaucoup de respect pour ce que la LDH a incarné» mais «je ne comprends plus certaines de ses prises de position», a déclaré la Première ministre lors de la séance des questions au gouvernement du Sénat, relayant les critiques de son ministre de l'Intérieur, Gérald Darmanin.
Après les propos polémiques de @GDarmanin sur la @LDH_Fr, @Elisabeth_Borne défend son ministre de l’Intérieur : "J’ai beaucoup de respect pour ce que cette association a incarné mais je ne comprends plus certaines de ses prises de position"#QAG pic.twitter.com/2HIS6sI7bw
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La cheffe du gouvernement a pointé les «ambiguïtés» de la LDH «face à l'islamisme radical» et le fait que l'association a récemment «attaqué un arrêté interdisant le transport d'armes par destination à Sainte-Soline» (Deux-Sèvres), lieu d'affrontements entre manifestants opposés aux mégabassines et forces de l'ordre. Les «armes par destination» désignent tout objet pouvant être utilisé comme projectile ou dans des affrontements avec les forces de l'ordre.
Pour autant, Elisabeth Borne a assuré qu'il n'était «pas question de baisser par principe la subvention de telle ou telle association», souhaitant que les organisations de défense des droits humains «poursuivent leur action de vigie». «Mais dialoguer avec les associations sur leurs actions est aussi une responsabilité, dès lors qu'il s'agit de financement public», a poursuivi la Première ministre.
Le président de la LDH réagit
De son côté, le président de la Ligue des droits de l'Homme Patrick Baudouin s'est aussitôt déclaré «révolté» par «l'amalgame» d'Elisabeth Borne et «surpris de la déformation» de la position de l'association fondée en 1898 lors de l'affaire Dreyfus, en appelant la Première ministre à «apaiser le débat et non envenimer les choses».
Elisabeth Borne «cède à des petites sirènes qui la font glisser vers des propos qui ne sont pas acceptables à notre égard (...) c'est une petite musique qui court du côté de certains de nos adversaires situés plutôt à droite, voire à l'extrême droite», a également souligné Patrick Baudouin.
A propos des «armes de destination», le président de la LDH a souligné que son organisation ne remettait pas en cause l'interdiction du port d'armes mais contestait la définition choisie, qui méconnaissait la jurisprudence du Conseil constitutionnel refusant l’extension a priori de la notion d'arme à tout objet utilisable comme projectile.
La gauche se mobilise
Du côté de la gauche, les déclarations d’Élisabeth Borne, déjà dans l’œil du cyclone en raison de son passage en force sur la réforme des retraites, ont suscité un véritable tollé. «Mme Borne ne veut pas désavouer son ministre de l'Intérieur» et va «mettre de nouveau de l'huile sur le feu», a ainsi déploré sur Public Sénat la cheffe de file des sénateurs communistes, Eliane Assassi.
"@GDarmanin envisage de remettre en cause sans sourciller les subventions de la LDH", dénonce @ElianeAssassi "Ces menaces sont d’une gravité insupportable. Un ministre de la République peut-il porter atteinte à une association qui est l’honneur de cette dernière ?" #QAG pic.twitter.com/MZJCfVJ1ir
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Le sénateur écologiste David Salmon a dénoncé un «chantage à la subvention», et déploré «un moment où on n'a plus le droit d'interroger les politiques du gouvernement», alors que l'eurodéputé et ancien leader d'EELV Yannick Jadot a quant à lui jugé que la Première ministre «confirme la dérive illibérale du régime d'Emmanuel Macron.
La droite soutient la majorité
A droite, le chef de file des sénateurs LR Bruno Retailleau a proposé de «couper les subventions» à la LDH, dénonçant une «terrible ambiguïté et même une complicité» de l'association avec des organisations «islamistes» aujourd'hui dissoutes telles que le CCIF (Collectif contre l'islamophobie en France).
La LDH «a eu sans doute un noble passé, un passé glorieux» mais elle est «en train de se perdre dans des querelles d'extrême gauche», selon Bruno Retailleau.