Pas moins de 10 manifestations contre la réforme des retraites ont été organisées à Paris depuis le début de la contestation en janvier. La dixième, ce mardi 28 mars, va relier la place de la République à celle de la Bastille. Mais qui choisit le parcours des manifestations ? Qui a le dernier mot ?
A qui le tour ? Parfois organisées rive droite, parfois rive gauche, les manifestations qui se tiennent à Paris sont parfaitement réglementées, afin de permettre aux autorités d'assurer la sécurité des manifestants et éviter que les choses ne dégénèrent et s'enveniment. Dans la capitale, c'est la préfecture de police (PP) – dirigée par Laurent Nuñez – qui a le dernier mot.
«soumis à l’examen du préfet de police»
«Afin d'éviter toute gêne aux riverains et piétons et perturber le moins possible la circulation, les manifestions ou animations sur la voie publique (chaussée et trottoirs) sont strictement réglementées», rappelle en effet le ministère de l'Intérieur, qui explique qu'à Paris, «les projets d’animation sont soumis à l’examen du préfet de police, en charge de la police et garant de l'ordre, de la sécurité et de la tranquillité publics».
Concrètement, les parcours des manifestations sont d'abord proposés par les organisations syndicales en charge de l'événement, qui choisissent souvent des lieux symboliques comme la place de la République rive droite ou encore le quartier des ministères avec la place Vauban rive gauche. Une proposition qui doit être déclarée auprès de la PP, qui a le pouvoir non pas d'autoriser la manifestation mais d'en modifier le parcours ou de le scinder en deux en fonction du nombre de manifestants par exemple.
Et c'est justement parce que ce sont les organisateurs qui choisissent où ils veulent défiler qu'historiquement, les manifestations dites «de droite» ont plutôt lieu dans les quartiers chics de Montparnasse, des Invalides ou encore du boulevard Saint-Michel, et celles dites «de gauche» dans les quartiers plus populaires de la République ou encore Bastille, tandis que l'extrême-droite a pris l'habitude de se retrouver le long de la rue de Rivoli, place des Pyramides (1er), devant la statue de Jeanne d'Arc.
Interrogée à ce sujet, l'institution confirme qu'elle n'est pas là pour «autoriser» une manifestation, mais pour «assurer l'ordre public». «Les organisateurs font une déclaration où ils expliquent la date et l'heure de leur manifestation, la déposent chez nous et si éventuellement, l'horaire ne convient pas en raison d'autres manifestations prévues en même temps par exemple, on voit avec eux pour changer de jour et de lieu, mais c'est seulement en cas de risque de trouble à l'ordre public qu'on peut les interdire», explique-t-on à la PP, qui précise que «la présence éventuelle de casseurs» n'est «pas une raison valable» pour interdire une mobilisation.
toute manifestation non déclarée devient illégale
D'ailleurs, Amnesty International considère que cette «obligation de déclaration préalable» est une forme d'autorisation détournée. «La loi française ne le dit pas tel quel, mais une manifestation non déclarée devient en fait illégale, ce qui revient à faire de la déclaration préalable une sorte de mécanisme d’autorisation», explique l'ONG internationale, qui rappelle que le droit de manifester est inscrit dans le droit français et qu'une manifestation n'a normalement «pas besoin d'être autorisée pour être légale».
A noter par ailleurs que le Code de la sécurité intérieure punit de six mois d’emprisonnement et de 7.500 euros d’amende le fait d'organiser une manifestation sans la déclarer ou en la déclarant de manière volontairement erronée ou trompeuse, ainsi que le fait de maintenir une manifestation après son interdiction. Enfin, participer à une manifestation interdite est passible de l'amende prévue pour les contraventions de la quatrième classe. Soit 135 euros d'amende (minorée à 90 euros).