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Retraites : quelles pourraient-être les autres solutions pour maintenir l'équilibre du système ?

Selon le Conseil d'orientation des retraites, il existe d’autres scénarios qui conduiraient à une restauration de l'équilibre ou à un déficit mesuré, sans toucher à l’âge légal de départ. [JEAN-FRANCOIS MONIER / AFP]

Le gouvernement a fait de l’équilibre financier du système de retraite le point central de sa réforme. S’il a choisi de l’atteindre en reculant l’âge légal de départ, l’exécutif aurait aussi pu se conformer aux autres scénarios évoqués par le Conseil d’orientation des retraites (COR), qui prévoyaient un retour à l’équilibre par le biais d’autres solutions économiques.

Un jeu d’équilibriste. Si le gouvernement a martelé l’importance d’un retour à l’équilibre financier de notre système de retraite pour justifier sa réforme, il a omis de rappeler qu’elle se basait sur l’un des scénarios, le pire, qui prévoit un accroissement important du déficit en raison de plusieurs paramètres économiques. Comme le précise le COR, il existe d’autres scénarios qui conduiraient à une restauration de l'équilibre ou à un déficit mesuré, sans pour autant toucher à l’âge légal de départ.

Des projections pessimistes

Après des années de déficit, le système de retraite a enregistré un excédent de 900 millions d'euros en 2021. Ce bon résultat s'explique essentiellement par le rebond d'activité économique après la crise sanitaire. En 2022, l'excédent s'est même élevé à plus de trois milliards d'euros.

Pour la période de 2022 à 2070, le Conseil d’orientation des retraites prévoit plusieurs modèles de projection où l’équilibre financier est dicté par les hypothèses de chômage et de croissance de la productivité du travail retenues. Pour ce faire, le COR a basé ses prédictions sur un taux de chômage à 7% et sur quatre scénarios d’évolution de la productivité allant de 0,7 à 1,6%.

Selon ces projections, la situation financière du système de retraite se détériorerait de 2022 à 2032 avec un déficit allant de -0,5 à -0,8 point de PIB en fonction du scénario retenu. Sur les 25 années suivantes, le système de retraite serait en moyenne globalement toujours déficitaire, quel que soit le scénario privilégié. A plus long terme, la santé financière du système dépendrait en revanche très fortement de l'hypothèse retenue et du niveau d’intervention de l’Etat pour contribuer au financement des régimes publics et spéciaux.

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Finalement, en fonction du scénario retenu et des nombreux paramètres économiques qui le définissent, le COR rappelle que l’équilibre du système de retraite français n’est pas forcément menacé, et que selon les préférences politiques, il est parfaitement légitime de défendre que les niveaux projetés sont trop ou pas assez élevés, et qu’il faut ou non mettre en œuvre une réforme du système.

Autrement dit, la nécessité d'une réforme relève d'un choix politique et plusieurs autres solutions peuvent se mettre en place, naturellement ou avec l'aide du gouvernement, afin de ne pas toucher au système actuel tout en garantissant son équilibre financier. 

relancer la natalité ou favoriser l’immigration

L’évolution de la part des dépenses de retraite dans le PIB synthétise le montant du prélèvement sur la richesse produite par les actifs nécessaire pour équilibrer le système. Or, le nombre de retraités augmente plus rapidement que le nombre d'actifs. 

Le gouvernement utilise donc le vieillissement de la population et la baisse du taux de natalité, donc la baisse du nombre d’actifs, pour justifier sa réforme. Aujourd'hui, on dénombre un peu moins d'1,7 actif pour un retraité en France. 

Pourtant, si le contexte démographique venait à s'inverser, soit à travers une politique de relance de la natalité, soit à travers une politique en faveur de l'immigration, de fait, le nombre de cotisants augmenterait de manière significative, ce qui permettrait de maintenir l'équilibre du système. 

réduire le taux de chômage 

Comme le Conseil d’orientation des retraites l’a bien expliqué, les projections utilisées par le gouvernement pour justifier sa réforme correspondent à des prévisions économiques qui impliquent notamment le taux de chômage et de productivité en France dans les prochaines années.

Or, par définition, ces taux sont plus qu’incertains. Depuis son premier mandat, Emmanuel Macron n’a eu de cesse de rappeler que son objectif était de conduire la France vers le plein emploi (chômage inférieur à 5%). Dans ce cas de figure, le nombre d’actifs serait bien supérieur au taux mesuré par le COR (7%), ce qui augmenterait le nombre et la valeur des cotisations, et qui rapprocherait un peu plus le système des retraites vers l’équilibre.

On peut donc considérer qu'une politique d'emploi menée par le gouvernement pour faire baisser le chômage en France conduirait naturellement à la résorption du déficit du système de retraite. 

augmenter les salaires et favoriser l’égalité femmes-hommes

Par ailleurs, une autre possibilité pour résorber le déficit du financement des retraites serait l’augmentation générale des salaires. En effet, le gouvernement pourrait mener des négociations avec les organisations patronales pour mettre en place une politique d'augmentation générale des salaires. Celle-ci conduirait à une hausse naturelle des cotisations de chaque actif, et permettrait aisément de maintenir l'équilibre du système de retraite. 

Toutefois, cela irait à l’encontre de la vision politique et économique libérale d’Emmanuel Macron, et il serait également très difficile de convaincre le patronat d’adhérer à cette proposition.

D'autre part, selon les données de l'Insee, en 2019, le revenu salarial annuel moyen dans le secteur privé et la fonction publique s'élevait à 18.970 euros pour les femmes, soit un niveau inférieur de 22% à celui des hommes. Le revenu salarial médian des femmes était également inférieur de 16% à celui des hommes. Par ailleurs, cet écart s'amplifie à la fois dans les bas revenus (25% pour le premier décile), et dans les hauts revenus (21% pour le neuvième décile). 

Ainsi, si le gouvernement faisait le choix de prendre les mesures nécessaires pour réduire les écarts de revenus entre les hommes et les femmes, les cotisations de ces dernières seraient bien supérieures à leur état actuel, et permettraient de combler une grande partie du déficit projeté. 

augmenter les cotisations

Enfin, si le gouvernement souhaite rétablir l’équilibre du système sans toucher à l’âge légal de départ, la dernière option serait d’augmenter les cotisations pour la retraite. Cela signifie que chaque actif se verrait ponctionner une part légèrement plus importante de son salaire afin de financer les pensions des retraités.

Néanmoins, si les salaires n’augmentent pas, le salaire réel perçu par les actifs (une fois toutes les cotisations et impôts prélevés) diminuerait. C’est donc une solution qui risque de susciter une forte opposition.

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