Programmé pour être lancé dès l'année prochaine, le réaménagement de la porte de Montreuil (20e) ne fait pas l'unanimité au sein des élus parisiens. Si tous s'accordent à dire que le site doit être amélioré, certains militent pour un «projet plus sobre» que celui prévu initialement. Il vient d'être retoqué au Conseil de Paris, ce jeudi 13 octobre.
L'exécutif parisien vient d'être «mis en minorité» se félicite ce jeudi la droite parisienne, alors que le réaménagement de la porte de Montreuil va devoir être «remis à plat» après le vote des élus écologistes et de l'opposition de droite et du centre en ce sens. Une remise à plat néanmois symbolique dans la mesure où, comme l'a souligné Emmanuel Grégoire, elle n'a «pas de portée juridique».
Le premier adjoint à la mairie de Paris, chargé de l'urbanisme, a néanmoins rappelé que «renoncer aujourd'hui au projet tel qu'il a été engagé ferait perdre des années». «Quel regret que vous n'ayez pas exprimé cela bien avant», a-t-il ajouté, reprochant aux élus écologistes – qui font pourtant partie de la majorité – d'effectuer «des revirements au dernier moment».
Jugée «inhospitalière», la porte de Montreuil (20e) doit être entièrement réaménagée. Un projet dans les bacs depuis plus de vingt ans et plusieurs fois reporté, avant qu'une nouvelle mouture qui porte l'ambition de gommer «la barrière symbolique du périphérique» afin de créer «un trait d'union avec les communes limitrophes» soit finalement votée à l'unanimité au Conseil de Paris de décembre 2019. Sauf que celle-ci est désormais vivement critiquée, notamment parce qu'elle comporte des constructions sur le talus du périphérique.
Un projet à «remettre à plat» ?
«Alors même que la Cour administrative d’appel de Paris vient de confirmer l’annulation du permis de construire des immeubles-ponts aux portes Maillot et de Champerret pour raison sanitaire : le message ne vaut-il pas aussi pour la porte de Montreuil ?», s'étaient ainsi justement interrogés l'architecte Bernard Landau, le philosophe Thierry Paquot et le critique architecture-ville-paysage Gwenaël Querrien, dans une tribune parue ce lundi 10 octobre dans le journal du Grand Paris.
Un avis partagé par les élus écologistes parisiens, qui viennent donc ce jeudi de faire voter leur vœu «pour un aménagement équilibré et harmonieux de la Porte de Montreuil». Eux estiment en effet que le projet tel qu’il est «manque d’ambition dans le traitement végétal et paysager compte tenu de l’accélération et de l’intensité du réchauffement climatique et surtout ne permet en aucun cas de faire renaître la ceinture verte sur ce secteur». Ils souhaitent donc «remettre à plat» le projet proposé par Nexity.
Ils réclament également «l’abandon de l’ensemble des immeubles de bureaux situés à l’est, côté Montreuil», mais aussi «la préservation des arbres, l’augmentation significative de la pleine terre ainsi que la création d’un nouveau square et d’une véritable coulée verte» ou encore «un léger recouvrement de la porte» afin de «préserver la partie de pleine terre du terre-plein central, permettant la circulation apaisée des piétons et des cyclistes».
«Deux visions s'opposent au sein de la majorité parisienne : les socialistes et communistes défendent le projet immobilier de Nexity et les écologistes veulent un projet sobre et harmonieux», confirme Emile Meunier, élu écologiste dans le 18e, qui déplore la construction de 60.000 m2 de bureaux construits sur les talus arborés du périphérique, qui ne feront, selon lui, qu'«accentuer la fracture entre Paris et la banlieue», la construction «d'un immeuble-pont sur le périphérique» pour y loger un hôtel 4 étoiles ou encore le projet de «mettre en boite dans une sorte de galerie commerciale de 6.600m2» les puciers qui «constituent l'histoire et le cœur battant de ce quartier».
Le projet prévoit un immeuble-pont sur le périph' pour un hôtel 4*. Quel sens du timing ! La Cour administrative d'appel de #Paris vient d'annuler les permis de construire de deux immeubles similaires pour des raisons de santé publique. https://t.co/7TUZ7YrmOM
5/13— Emile Meunier (@emilemeunier) October 9, 2022
Autre critique de l'élu écologiste : le coût de l'opération estimé à 140 millions d'euros dont une grande partie financée par la Ville. «Ce projet coûte très cher à la Ville : le bilan des charges municipales s'élève à 90 millions d'euros, comprenant le coût de la dalle, de la place, la relocalisation des services municipaux et d’autres programmes restant sous maîtrise d'ouvrage», fait-il savoir, expliquant que pour financer l'opération, Paris avait cédé ses talus de pleine terre contre 37,5 millions d'euros.
L'«Insupportable» réveil des opposants au projet
De son côté, Jacques Baudrier, l'adjoint à la mairie de Paris chargé de la construction publique et du suivi des chantiers, défend un projet qui «prévoit la création d'un vaste espace paysager avec 7.000 m2 d'espaces plantés et 224 arbres supplementaires», ainsi que «la construction côté Montreuil d'immeubles d'activités amenant de la vie sur cette grande place».
L'élu communiste rappelle en outre que le projet est vivement plébiscité par les riverains et les commerçants de la porte de Montreuil, alors qu'une pétition stipulant de «l'urgence de lancer les travaux» a obtenu plus de 1.000 signatures.
Selon lui, «les critiques sont largement infondées», alors que «la porte de Montreuil est un îlot de chaleur urbain» et que «le projet permet d'améliorer très fortement la situation». Il juge surtout «insupportable» que des opposants à ce projet déjà voté viennent «relancer un nouveau projet et repartir de zéro». Une action qui pourrait «remettre encore de huit à dix ans la réalisation» de ce réaménagement pourtant vivement attendu par les habitants.