Ils ont décidé d'attaquer en justice. Mobilisés pour faire évacuer le camp de toxicomanes qui s'est formé square de la porte de la Villette (19e) depuis septembre dernier, des riverains et commerçants ont lancé une procédure judiciaire à l'encontre de la municipalité parisienne et de la préfecture de Paris.
«Nous avons usé de tous les moyens pour être entendus : plaintes, manifestations, courriers, appels médiatiques, appels aux élus, etc... Rien n'y fait : les autorités, passives, indifférentes, demeurent dans un immobilisme coupable. Aujourd'hui, las, nous décidons donc de porter ce combat devant le juge avec le soutien de notre avocat, Me Moser», ont ainsi fait savoir les riverains et commerçants de la porte de la Villette (19e), qui entendent faire pression sur les autorités publiques.
Camp du #crack porte de la #Villette : Le cabinet @MoserAvocat accompagne les habitants et les commerçants de la Porte de la Villette dans leur procédure en justice contre la Préfecture de Police de Paris et la Mairie de Paris.
Lettre ouverte à @prefpolice
1/4 pic.twitter.com/o5Ol6f43OG— Moser Avocat (@MoserAvocat) June 3, 2022
Une énième action, après les manifestations et autres mobilisations citoyennes, «pour que des solutions durables et humaines soient trouvées contre cette catastrophe humanitaire, qui ne devra plus jamais être déplacée au gré des humeurs politiques».
«Nous voulons dire aux autorités combien leur carence est fautive. Nous voulons leur rappeler qu'une telle résignation, qu'un tel aveu d'impuissance, n'est pas acceptable», font-ils également savoir dans un communiqué.
Des réparations pour le préjudice moral subi
Dans un courrier adressé par leur avocat à la préfecture de police de Paris le 31 mai dernier, ces riverains mobilisés «somment solennellement» le préfet de police «de faire déplacer ce camp du crack et de la mort vers un autre site distant de toute habitation et de tout commerce», et sollicitent également «réparation du préjudice moral subi par les habitants de la porte de la Villette pour un montant de 100.000 euros».
Pour rappel, les consommateurs de crack avaient été déplacés au square de la porte de la Villette le 24 septembre 2021, à la demande de la préfecture de police de Paris, et ce, notamment pour faire place nette autour des Jardins d'Eole (18e), où ils s'étaient installés après l'évacuation de la place Stalingrad. Sur la Colline du crack, à Stalingrad, aux Jardins d'Eole... et aujourd'hui, à la porte de la Villette, plusieurs centaines de toxicomanes vivent là dans des conditions sanitaires déplorables.
Une installation censée être «provisoire», qui dure depuis plus de 8 mois. Et si les autorités publiques – l'Etat, la préfecture de police, l'ARS et la municipalité parisienne – semblaient enclines à trouver des solutions il y a encore quelques mois, force est de constater que la période électorale a mis un arrêt aux discussions, qui paraissaient pourtant bien engagées malgré des désaccords de fond.
Le 15 septembre dernier pourtant, le Premier ministre Jean Castex avait donné son feu vert pour «la création de nouveaux lieux dédiés à l’accueil et au repos», invitant même Anne Hidalgo à lui proposer des sites pour les accueillir, juste avant que le ministre de la Santé Olivier Véran annonce à son tour, le 23 septembre, la prochaine expérimentation de Haltes soin addiction (HSA) financées par l’Etat. Ni l'un, ni l'autre n'ont vu le jour.
La nouvelle Première ministre appelée à la rescousse
Seuls les 3 maires d'Aubervilliers Karine Franclet, de Pantin, Bertrand Kern, et du 19e arrondissement de Paris, François Dagnaud, poursuivent leur mobilisation. Ensemble, comme ils ont pris l'habitude de le faire, ils ont écrit à la Première ministre Élisabeth Borne, lui demandant d'agir face à la «situation désastreuse» du square de la porte de la Villette, où vivent abandonnés les consommateurs de crack.
«L'ambiance, déjà très lourde, deviendra explosive sans une intervention rapide et coordonnée entre tous les services de l’État concernés», affirment-ils dans une lettre envoyée la semaine dernière à Matignon. Eux plaident pour «une prise en charge globale, sanitaire, médicale et sociale» des toxicomanes «en environnement hospitalier, à bonne distance de zones denses d'habitations de quartiers populaires et des zones de trafic et de consommation», mais aussi «davantage de moyens policiers».