Le 13 novembre 2015, cette témoin-clé s’est retrouvée nez à nez avec le terroriste Abdelhamid Abaaoud devant un buisson avant de le dénoncer. Elle doit être entendue ce vendredi devant la cour d’assises spéciale de Paris.
Le 15 novembre 2015, cette femme, depuis anonymisée à chaque apparition médiatique derrière le pseudonyme de «Sonia», avait reconnu le terroriste belgo-marocain qui était en contact avec sa cousine Hasna Aït Belahcen, qu’elle hébergeait chez elle. D’un coup de fil, elle a transmis des informations concernant Abdelhamid Abaaoud à la police. Un acte qui a permis l’intervention décisive à Saint-Denis.
Cet acte de bravoure, qui a permis la neutralisation du terroriste, a été salué faisant de «Sonia» une héroïne, tout en l’exposant au danger et aux risques de représailles.
Protection des témoins
Quelques mois plus tard, l’élu Les Républicains de Côte-d’Or, Alain Houpert, a exigé la protection de cette femme et de toutes les personnes qui se retrouvaient dans la même situation qu’elle, en mettant en lumière le vide juridique sur la protection des témoins en France.
«Le véritable nom de ce témoin apparaît dans toute la procédure à laquelle ont accès l’ensemble des parties civiles, les mis en examen ainsi que certains médias, mettant sa sécurité en grand péril», disait-il.
Une requête à laquelle avait répondu favorablement le ministre de l’Intérieur à l’époque, Bernard Cazeneuve. «Le Gouvernement a effectivement décidé de renforcer et d'adapter les dispositions du code de procédure pénale en matière de protection des témoins, dans le cadre du projet de loi renforçant la lutte contre le crime organisé, le terrorisme et leur financement, et améliorant l'efficacité et les garanties de la procédure pénale, délibéré en conseil des ministres le 3 février 2016 et discuté au Parlement dès le printemps», peut-on lire sur le site du Sénat.
Une rencontre en face à face
Au micro de France Inter, «Sonia» avait raconté en 2016 sa rencontre nez à nez avec le terroriste. Deux jours après l’attentat, la femme était dans le salon avec la cousine d’Abdelhamid Abaaoud. Le téléphone de cette dernière a sonné et un numéro belge s’affichait sur l’écran. Hasna Aït Belahcen a demandé à «Sonia» un véhicule pour aller chercher «un de ses petits cousins qui dort dehors». S’inquiétant pour sa colocatrice, «Sonia» avait décidé de l’accompagner avec son amoureux.
Alors que le mari de la témoin-clé est resté dans la voiture, «Sonia» a accompagné la cousine du terroriste à l’extérieur quand soudain, un homme a surgi d’un buisson. Il s’agit d’Abdelhamid Abaaoud.
Le terroriste se vantait d’avoir tiré à la kalachnikov et «Sonia» n’arrêtait pas de protester. Abaaoud prétendait que «90 terroristes» était sur le sol français pour mener de nouvelles attaques contre des «kouffars et des mécréants». Le but étant de venger «les bombardements en Syrie».
«Je lui dis qu'il a tué des innocents, que l'islam, ce n'est pas ça», avait-elle affirmé. «J’ai vu un monstre sanguinaire devant moi», avait-elle dit après avoir réalisé qu’elle était en face de l’un des terroristes les plus recherchés en France.
De retour chez elle, Sonia avait montré des photos des victimes sur les terrasses à Hasna Aït Belahcen. «Pour moi, les victimes avaient besoin du coupable devant elles, pour qu’elles puissent comprendre et voir la froideur de cet être ignoble. Il était impossible pour moi d’être complice. Déjà, être au courant, ça me rendait complice. Laisser agir, ça me rendait coupable», précisait-elle.
Comprenant que la cousine du terroriste ne le ferait pas, l’héroïne a pris son téléphone et a rapporté les informations et le déroulement de cette rencontre macabre à la police. C’est ce coup de téléphone qui a permis la neutralisation d’Abdelhamid Abaaoud.