Le collectif «Sauvons le mérite» – lancé à l'initiative de plusieurs anciens élèves et professeurs des lycées Henri IV et Louis-le-Grand – a fait part de son mécontentement dans une tribune publiée ce dimanche 20 février dans le JDD, alors que ces deux prestigieux établissements s'apprêtent à perdre «leur autonomie de recrutement».
Nul besoin de les présenter, tant la réputation de ces deux lycées parisiens n'est plus à faire. Jusqu'à aujourd'hui, seuls les meilleurs élèves parisiens obtenaient une clé d'entrée aux lycées Henri IV et Louis-le-Grand – tous deux situés en plein cœur du quartier étudiant, dans le 5e –, considérés comme le plus beau tremplin pour intégrer les universités et grandes écoles françaises.
La sélection sur dossier bientôt finie ?
Sauf que cette «autonomie de recrutement» – qui offrait à ces deux lycées le luxe de recruter leurs élèves sur dossier – pourrait bientôt changer, alors que le rectorat entend intégrer les deux établissements dans l'algorithme d'Affelnet. Dès lors, la direction de ces établissements ne pourra plus choisir ses élèves, mais sera tenu de respecter la décision du rectorat, prenant avant tout en compte les vœux de la famille et le secteur géographique.
Dans la tribune «Monsieur Blanquer, ne tuez pas la méritocratie», publiée ce dimanche dans le JDD, un collectif d'anciens élèves, parents d'élèves et professeurs s'oppose catégoriquement à cette réforme. Ensemble, ils dénoncent «l'injustice et la brutalité de la méthode», alors que «les règles du jeu» sont modifiées «à la dernière minute» pour les élèves de 3e.
«La sélection sur dossier [...] est bien la clé de succès de ces lycées. Qui peut contester leur capacité à repérer, depuis des décennies, des talents exceptionnels –futurs prix Nobel et médaillés Fields – issus de tous milieux et de toutes origines ? En 2020, les lycéens de Louis-le-Grand venaient de 175 collèges et ceux de Henri IV venaient de 170 collèges. Monsieur le ministre, en matière de diversité, qui dit mieux ?», écrivent-ils encore.
Eux militent plutôt pour l'introduction d'un quota d'élèves boursiers et craignent que seules les familles aisées pourront envoyer leur(s) enfant(s) dans les lycées sélectifs. «Nous sommes nombreux à penser qu'il faut plus [...] de lycées sélectifs ouverts à tous, sur la seule base du mérite, pour produire les scientifiques, chercheurs, femmes et hommes de lettre de demain», peut-on lire dans cette tribune.
En face, le secrétaire académique pour les personnels de direction du Sgen-CFDT Paris, Kamel Aït-Bouali, avance une pensée contraire, expliquant que «la mixité sociale est un atout pour tous», qui «motive les plus fragiles et conforte les plus solides». Il donne l'exemple des classes de niveau «qui regroupaient les élèves en difficulté», les laissant «stagner dans la relégation».