La cour administrative d'appel de Paris a décidé de suspendre ce lundi 20 septembre le permis de construire de la piscine d'entraînement des Jeux olympiques de Paris 2024, qui devait être réalisée à Aubervilliers (93), en lieu et place des jardins ouvriers des Vertus.
Selon l'arrêt de la cour, il existe en effet de «sérieux doutes sur la légalité» de ce permis, déposé de façon irrégulière par Karine Franclet, la maire UDI d'Aubervilliers, et délivré sans respecter certaines règles en matière d'urbanisme, notamment la compensation des arbres abattus.
Le projet implique notamment la destruction de 67 arbres, «alors que le permis de construire n'envisage au titre de la compensation [...] que la replantation de 47 arbres», a ainsi détaillé la cour.
Un projet contraire à l'urgence écologique
C'est d'ailleurs pour cette raison que trois jardiniers et deux associations de défense de l'environnement sont à l'initiative de cette procédure d'urgence, déplorant que les parcelles concernées par les travaux aient déjà été détruites.
Une attaque à laquelle l'élue a répondu ce lundi : «on se pourvoit en cassation auprès du Conseil d'Etat et on va engager des actions point par point pour résorber chaque problématique posée par le juge».
Lors de l'audience qui s'est déroulée le 15 septembre dernier, le juge quant à lui s'était montré perplexe sur ce projet d'un montant de 33 millions d'euros, dont environ un tiers doit être financé par la Solideo, la société chargée de livrer les ouvrages pour les JO de Paris 2024.
La décision de la cour intervient une quinzaine de jours après l'évacuation de militants écologistes qui occupaient les jardins depuis quatre mois, et qui en avaient fait un «jardin à défendre». Ce samedi 18 septembre encore, environ 300 personnes ont défilé à Aubervilliers pour dénoncer ce projet contraire selon eux à l'urgence écologique. Ils visent en particulier le solarium qui doit accompagner le centre aquatique et voir le jour en lieu et place des arbres et potagers.
Scandale
Le Permis de construire vient d'être suspendu par la justice mais les travaux d'excavation continuent en ce moment même !!!
https://t.co/iwhskNKHgu pic.twitter.com/agQyDf4Y39— JAD - Jardins a défendre d'Aubervilliers (@JardinsAuber) September 20, 2021
SAMEDI 18 SEPTEMBRE, venez soutenir les collectifs qui ont défendus les Jardins d'Aubervilliers jusqu'à leur destruction
Venez exposer votre RAGE face à cette injustice
Mais venez aussi partager avec les citoyen-ne-s et collectifs (@JardinsAuber @2024Saccage etc.) https://t.co/RhyQZrmAws— Extinction Rebellion France (@xrFrance) September 17, 2021
Les travaux désormais interrompus, plusieurs élus écologistes notamment se réjouissaient de la nouvelle mais regrettaient qu'une grande partie du site ait déjà été éventrée. C'est le cas de Fatoumata Koné, la présidente des élus écologistes au Conseil de Paris, qui déplore que cette décision «arrive après qu'une partie des jardins ouvriers d'Aubervilliers ait été détruite début septembre» et qui rappelle que ces jardins abritaient «22 espèces d’oiseaux protégés ainsi que des espèces comme le hérisson d’Europe et le grillon d’Italie».
En vue de la réalisation de cette piscine, les jardins ouvriers des Vertus – enclave centenaire de 2,5 hectares au pied des tours – devaient être amputés de 4.000 m2. Une perte qui devait être compensée par les bienfaits apportés par cette nouvelle infrastructure sportive à destination des habitants, alors que 60 % des enfants de Seine-Saint-Denis ne savent pas nager à leur entrée en sixième, notamment faute d'installations suffisantes.
Pour rappel, la même juridiction avait interrompu en avril les travaux de construction du futur village des médias – aussi surnommé «le cluster des médias» –, autre projet phare des Jeux olympiques, à Dugny, en Seine-Saint-Denis. Mais trois mois plus tard, après l'étude du dossier au fond, elle avait fait machine arrière, autorisant la reprise du chantier.
Attention néanmoins, prévient Stéphane Troussel, car «si le calendrier ne permet pas que la piscine soit [considérée] comme un site d'entraînement [pour les JO], la Solideo posera le débat [de sa participation financière]». Pour le président (PS) du conseil départemental de la Seine-Saint-Denis, le risque est que les 10 millions d'euros avancés par la Solideo soient récupérés par celle-ci.