Avec le récent retrait de liste LREM de Sophie Cluzel en PACA, pour se rallier à celle des Républicains de Renaud Muselier, la sphère politique française, et particulièrement sur la droite de l’échiquier, a connu de vives secousses. L’investiture LR a ainsi été immédiatement retirée à ce dernier, coupable, selon son parti, d’avoir pactisé avec, si ce n’est l’ennemi, au moins le concurrent.
Eric Ciotti, député LR des Alpes-Maritimes, n’a ainsi pas hésité à parler de «coup de poignard dans le dos». Il faut dire qu’une telle entente peut affaiblir encore plus la position des Républicains dans l’esprit des Français. En difficulté depuis la période Nicolas Sarkozy et malgré un changement de nom effectué en 2015 pour tourner la page UMP, le parti semble désormais coincé entre LREM et le Rassemblement national. Le premier, fraichement créé, est devenu le parti présidentiel, tandis que le second continue de susciter une dynamique qui lui permet de se présenter comme opposant principal.
Cependant, dire que Les Républicains ont été dépassés par ces deux concurrents ne serait pas entièrement juste, nuance le politologue Bruno Cautrès, chercheur au CNRS et membre du Cevipof (Sciences Po). La majorité des sièges du Sénat leur appartient toujours et les dernières élections municipales ont largement confirmé leur ancrage local, face à ceux-là.
Une ligne idéologique brouillée
Malgré tout, l’entente en Provence-Alpes-Côte-d’Azur comporte le risque de brouiller la perception politique du parti. Car si certains de ses membres sont prêts à nouer des alliances avec le camp d’Emmanuel Macron, d’autres sont de leur côté accusés de se rapprocher du RN. En indiquant que «ce qui nous différencie globalement du Rassemblement national, c’est notre capacité à gouverner», Eric Ciotti a ainsi permis à ses nombreux adversaires d’accuser son camp de s’aligner sur les idées du parti de Marine Le Pen. S’il s’en est défendu, la ligne politique des Républicains semble plus distendue que jamais.
D’autant que parmi les soutiens de Renaud Muselier, comme le maire LR de Toulon Hubert Falco, un rassemblement avec LREM est une façon de lutter contre «l’extrémisme», a-t-il expliqué sur les réseaux sociaux. Face à eux, plusieurs collègues de parti regrettent de les voir accéder si facilement aux avances du camp Macron, alors que la période, avec deux scrutins importants (les régionales en juin et la présidentielle dans moins d’un an) devrait plutôt être à l’affrontement. «Muselier, Estrosi et Falco ont passé un deal avec Macron, bien au-delà des régionales. C’est le piège de la macronie, en préparation de la présidentielle», analyse ainsi un parlementaire LR, cité par Le Figaro.
Un électorat fidèle
Le député du Vaucluse, Julien Aubert, estime lui aussi chez nos confrères que «cela met LR dans une situation impossible face à 2022. Certains de nos adhérents, dégoutés, sont prêts à claquer la porte». Une analyse à laquelle ne croit pas Bruno Cautrès : «qu’il y ait des tensions à l’intérieur du parti entre les cadres, il n’y a aucun doute là-dessus, mais je ne pense pas que les électeurs peuvent faire le saut. Il est trop important», nous explique-t-il. Que ce soit du côté de LREM ou du RN, les différences idéologiques seraient donc trop grandes pour voir l’électorat LR s’effriter.
D’autant que, selon le politologue, l’espace politique à droite pourrait être favorable aux Républicains d’ici à la présidentielle. «Leur électorat est très concerné sur les questions de sécurité et de respect de la loi. Or, ce sont des thèmes très présents et sur lesquels Emmanuel Macron va présenter un bilan plutôt négatif», anticipe-t-il. Un grappillage de voix de la part de LREM ne serait donc pas si certains dans un an.