Sur les 149 propositions mises au point lors de La Convention citoyenne pour le climat, deux avaient été choisies pour être soumises à un référendum. La création d'un «crime d'écocide» était l'une des élues, avec pour objectif de pouvoir punir les atteintes les plus graves à l'environnement. Ce dimanche 22 novembre, Eric Dupont-Moretti et Barbara Pompili annoncent un projet de réforme en ce sens mais il est question de délit et non plus de crime.
Interrogée par le Journal du dimanche (JDD), la ministre de la Transition écologique explique qu'en l'état, la proposition de la Convention citoyenne pour le climat «ne pouvait être retenue» car «potentiellement inconstitutionnelle».
Nous franchissons un cap historique pour la justice environnementale.
Un délit d’écocide pour sanctionner plus durement les atteintes à l’environnement.
Des juges et des policiers judiciaires dédiés à l’environnement.
Une réforme ambitieuse portée avec @E_DupondM @b_abba https://t.co/oALhJq00qW— Barbara Pompili (@barbarapompili) November 22, 2020
Selon le garde des Sceaux, la notion de délit a été préférée car «sur le terrain symbolique, le choix de ce mot "crime", est important. [...] l'écocide ne peut pas être traduit en crime, pour des questions de proportionnalité entre l'infraction commise et la sanction encourue». Mais, ils l'assurent, il sera puni en inscrivant «dans notre droit des peines renforcées pour les atteintes à l'environnement, des contrôles plus efficaces et un fonctionnement de la justice plus spécialisé».
Concrètement, la création de plusieurs délits est prévue. Le chef d'accusation de «mise en danger de l'environnement» permettrait notamment de pénaliser «les violations délibérées d'une obligation», détaille Eric Dupont-Moretti. Le contrevenant s'exposerait alors à une peine maximale d'un an de prison et 100.000 euros d'amende.
Jusqu'à 4,5 millions d'euros d'amende
Le «délit général de pollution» pourrait de son côté être passible de trois à dix ans d'emprisonnement et d'amendes allant de 375.000 à 4,5 millions d'euros. Les cas les plus graves concerneraient «une infraction intentionnelle ayant causé des dommages irréversibles à l'environnement».
Lors de la Convention citoyenne pour le climat, l'écocide avait été défini comme «toute action ayant causé un dommage écologique grave en participant au dépassement manifeste et non négligeable des limites planétaires, commise en connaissance des conséquences qui allaient en résulter et qui ne pouvaient être ignorées». Sachant que ces «limites planétaires», au nombre de neuf, comprennent entre autres le changement climatique, l'érosion de la biodiversité, l'acidification des océans ou la pollution chimique. Elles ont été formalisées en 2009, par une équipe de chercheurs internationaux.
Pour pouvoir juger ces délits d'un nouveau genre, la justice française va devoir s'adapter. Le garde des Sceaux évoque notamment la création de juridictions spécialisées dans chaque cour d'appel. Ce nouvel organe sera «compétent tant en matière civile, pour l'indemnisation des préjudices par exemple, qu'en matière pénale». Des postes d'assistants spécialisés seront également créés et des agents dédiés à la préservation de la biodiversité bénéficieront du statut d'officier de police judiciaire.
Barbara Pompili et Eric Dupont-Moretti assurent qu'il ne sera pas uniquement question de punition mais aussi de réparation. Dans les colonnes du JDD, la ministre de la Transition écologique annonce ainsi la mise en place d'une Convention judiciaire d'intérêt public qui agira en ce sens, car «il faut prévenir, punir mais aussi remettre en état l'environnement».