«Depuis fin 2018, en France, la répression des manifestations a été d'une ampleur inédite», et «des lois contraires au droit international ont été utilisées» : c'est le constat établi par l'ONG Amnesty International, qui publie ce mardi une vaste enquête sur la manière dont le gouvernement français a répondu aux mouvements sociaux qui ont agité la France ces deux dernières années.
Après 18 mois d'enquête et des entretiens avec des représentants des autorités et une centaine de manifestants arrêtés et poursuivis, l'ONG pointe notamment le fait que «des milliers de personnes ont été verbalisées, interpellées, arrêtées et poursuivies en justice pour des activités pacifiques qui n'auraient pas du être considérées comme des infractions». Et parmi les personnes arrêtées, précise l'ONG, on trouve des journalistes ou encore des observateurs des droits humains.
L'enquête revient notamment sur le mouvement des Gilets jaunes, dont les manifestants ont «particulièrement été réprimés par les autorités françaises», et parfois poursuivis ou condamnés «pour des activités qui ne devraient pas constituer des infractions pénales».
Sont également dénoncées les arrestations préventives «injustifiées», des centaines de personnes ayant été reconnues coupables de «participation à un groupement en vue de la préparation de violences». Certains manifestants ont ainsi été arrêtés et poursivis pour avoir porté des lunettes de natation destinées à se protéger du gaz lacrymogène et des tirs de LBD.
L'interdiction de dissimuler son visage pendant les manifestations, introduite en avril 2019, est également critiquée. Elle a entraîné le placement en garde à vue de 210 personnes et la condamnation de 41 d'entre elles, ce alors que le Covid-19 et l'obligation de porter un masque remettent en question la pertinence même d'une telle loi.
Amnesty International dénonce aussi le fait que la crise du Covid-19 a servi à «restreindre le droit de manifester de façon disproportionnée».
«Utiliser la loi de manière abusive contre les personnes qui prennent part à des manifestations n’est pas aussi visible que les violences policières, conclut l'étude. Mais c’est une autre forme de violence avec des effets tout aussi dévastateurs pour les personnes et le droit de manifester. Les autorités françaises doivent cesser de transformer les manifestants en délinquants et modifier toutes les lois qui portent atteinte au droit de se réunir pacifiquement.»