Quand certains ne font pas de mystères quant à leur prochaine présence sur la ligne de départ pour la course à la présidentielle (Emmanuel Macron, Marine Le Pen, Jean-Luc Mélenchon doit l'annoncer en octobre…), d’autres profitent de la période, à un an et demi de l’élection, pour avancer leurs pions de façon plus ou moins discrète et tester la possibilité de leur candidature.
Xavier Bertrand
Le président de la région Hauts-de-France ne s’en cache pas, il est «plus déterminé que jamais» pour l’élection de 2022. Pour appuyer ses ambitions et se placer déjà dans une situation d’affrontement, il n’hésite pas à s’en prendre directement à Emmanuel Macron, estimant qu’il «n’est pas à l’aise sur les sujets régaliens : sécurité, justice, défense ou respect de la laïcité» (Le Parisien).
L’ancien sarkozyste cherche ainsi à occuper la place à droite de l’échiquier politique, en chassant l’actuel président. «Il ne suffit pas d’avoir été banquier d’affaires pour être de droite (…). Si Emmanuel Macron était de droite, il aurait aussi lutté efficacement contre l’immigration illégale. Je suis intimement convaincu qu’il n’y a pas d’autre voie que le retour du respect de l’autorité républicaine». Ce faisant, il s’aligne ainsi déjà sur un thème dont il sait les électeurs de sa couleur politique sensibles.
Xavier Bertrand commence également à défendre son bilan dans le nord, rappelant son engagement pour l’emploi et le pouvoir d’achat et se présentant comme «le représentant d’une droite sociale, populaire, capable de rassembler et qui refusera toujours le moindre compromis avec l’extrême droite». Une déclaration claire de candidature, qui pourrait devenir une réalité tant la droite peine à se trouver un meneur. François Baroin, qui aurait pu lui disputer la place, ne semble en effet pas rêver d’un destin présidentiel. Le problème est que Xavier Bertrand n’est plus membre des Républicains, et ne plait pas à la partie «droitière» des militants.
Edouard Philippe
Certains estiment alors que l’ancien Premier ministre Edouard Philippe pourrait devenir une solution pour la droite. Malgré son alliance avec Emmanuel Macron et son départ des Républicains, il n’a jamais caché son ancrage de ce côté du paysage politique. Edouard Philippe a même été récemment désigné personnalité préférée des sympathisants la droite (26%, étude Ifop).
Le problème est qu’il apparait improbable de le voir se retourner contre Emmanuel Macron. Ses proches estiment même qu’il tentera de l’aider à sa réélection. La seule chance de le voir se lancer dans la course serait alors un désistement de l’actuel président, qui lui laisserait un chemin tout tracé vers l’Elysée. Mais un tel scénario est-il seulement envisageable ?
Anne Hidalgo
Du côté de la gauche, les têtes d’affiche ne sont pas légion non plus. Si Jean-Luc Mélenchon devrait selon toute vraisemblance représenter sa partie «extrême», les plus modérés peuvent se sentir orphelin. Dans ce contexte, Anne Hidalgo pourrait tirer son épingle du jeu et faire acte de candidature.
Un sondage Ipsos la désigne même en tête des personnalités capables de «faire gagner la gauche» en 2022 (26%, devant Bernard Cazeneuve à 24%). Si elle venait à se lancer dans la course, Anne Hidalgo prévient d’ores et déjà qu’il ne serait pas question de s’empêcher une alliance avec d’autres, écologistes en tête. «Je suis une sociale-démocrate qui a enrichi ses idées et sa pratique grâce à l’écologie», affirme-t-elle d’ailleurs.
Faire front commun avec les verts reviendrait assurément à créer une force de taille, capable de rassembler massivement dans les urnes. Son entente avec Eric Piolle, maire écologiste de Grenoble, est d’ailleurs mise en avant régulièrement. De là à imaginer un ticket à deux ?
Au soleil de juillet, un café avec Anne. Les communes ont porté l'histoire du pays, elles sont plus que jamais la bonne échelle pour changer la vie et anticiper l'avenir ! pic.twitter.com/VZlSojS2MA
— Éric Piolle (@EricPiolle) July 7, 2020
Yannick Jadot
Un duo Piolle/Hidalgo viendrait en tout cas siphonner les ambitions de Yannick Jadot, qui pousse pour que les verts désignent rapidement leur propre candidat (qu’il aimerait être). Le problème tient dans le fait que pour s’imposer en 2022, le parti écologiste devra ratisser plus loin que sa base, en convaincant des électeurs pour qui la préservation de l’environnement est importante mais pas plus que l’emploi, la sécurité, etc.
Yannick Jadot s’est ainsi récemment laissé aller sur le champ du communautarisme, en critiquant le burkini, qui «n’a rien à faire dans une piscine», selon lui. Une sortie qui a vivement dérangé de nombreux militants, dont l’idéologie sur ces questions est plus proche de l’extrême-gauche. Son courant étant minoritaire à EELV, son aventure présidentielle risque d’être très compliquée à s’inscrire au sein du parti.
Eric Piolle
Les difficultés de Yannick Jadot pourraient alors voir émerger une autre ambition présidentielle pour 2022, celle d’Eric Piolle. Si, comme vu plus haut, le maire de Grenoble est très proche d’Anne Hidalgo et pourrait l’accompagner dans la bataille, il pourrait également faire le choix de l’aventure en solitaire. Apprécié des militants et plus en phase avec les nouveaux élus EELV des grandes villes, aux idées très clivantes (comme à propos du Tour de France ou des arbres de noël), il symbolise la ligne «rouge-verte» des écolos.
Cependant, bien que son alliance avec le Parti communiste, LFI et Génération.s a été couronnée de succès localement, difficile d’imaginer pareille entente se faire au niveau national. D’autant plus s’il faut s’éclipser derrière lui.
En attendant, Eric Piolle affirme avoir une «stratégie différente» de celle de Yannick Jadot, pour faire gagner les écolos en 2022. Il souhaite ainsi créer «une équipe» capable de s’imposer, sans être obligé de trouver rapidement son buteur, qui fera gagner la partie le moment venu. Un buteur qu’il pourrait être ?