Après Agnès Buzyn, passée sur le gril la veille, la commission d'enquête de l'Assemblée nationale sur la gestion de la crise du nouveau coronavirus interroge mercredi 1er juillet deux autres ex-ministres de la Santé sur la gestion des stocks de masques en France, Marisol Touraine et Roselyne Bachelot.
Après avoir couvert la période mai 2017-février 2020, les députés vont continuer à remonter le temps pour tenter de comprendre comment la France a laissé fondre son stock stratégique de masques.
Marisol Touraine, ministre des Affaires sociales et de la Santé de 2012 à 2017, sera auditionnée à partir de 15H00 et Roselyne Bachelot, ministre de la Santé et des Sports de 2007 à 2010, à 17H00.
En 2011, au sortir de la pandémie de grippe A(H1N1), les stocks sont au zénith : la France compte près de un milliard de masques chirurgicaux et plus de 700 millions de modèles FFP2, plus protecteurs. Mais entreposer ces cartons a un coût, sachant que les masques se périment peu à peu, après quatre ou cinq ans.
Or, à l'époque, la question des coûts est épineuse : Roselyne Bachelot a été très critiquée pour avoir commandé trop de vaccins (94 millions de doses, dont seulement six millions avaient été utilisées) face à une pandémie finalement moins grave que redoutée.
Ironie du sort, l'épidémie de Covid-19 a signé son retour en grâce, et l'opinion veut aujourd'hui voir en elle l'incarnation d'un principe de précaution oublié par ses successeurs.
«J'ai du mal à considérer cela comme une revanche. Une revanche, c'est quelque chose de joyeux et je ne suis pas joyeuse. Je savais qu'on me rendrait justice et je pensais qu'on me rendrait justice après ma mort. Coup de bol : je n'ai attendu que dix ans», avait-elle dit en avril sur RMC.
En 2011, le plan national de prévention et de lutte contre les pandémies grippales est revu, sur le principe de "stock tournant", composé à la fois de masques chirurgicaux et FFP2. Résultat, les réserves ne sont plus renouvelées.
Buzyn se défend
En 2013, alors que Marisol Touraine est en poste, ce changement de doctrine est acté. Les stocks de masques sont gérés avec une logique de flux et l'idée de s'appuyer sur les importations chinoises et les capacités de production françaises pour reconstituer ces stocks en cas de crise.
La constitution des stocks n'est plus centralisée et charge est donnée aux employeurs (hôpitaux, cliniques privées...) «de déterminer l'opportunité de constituer des stocks de masques pour protéger leur personnel», en particulier FFP2, selon un texte officiel.
En 2015, un rapport du sénateur Francis Delattre sonne comme une première mise en garde sur la baisse des stocks. Cinq ans plus tard, ils ont fondu. Lorsque le nouveau coronavirus commence à se propager, l'Etat ne dispose d'aucune réserve en FFP2, de 117 millions de masques chirurgicaux adultes et de 40 millions pour enfants.
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Mardi, pendant quatre heures denses, Agnès Buzyn a défendu sa gestion de la crise sanitaire, trois mois après son départ du gouvernement pour tenter, en vain, de conquérir la mairie de Paris.
«Vous ne pouvez pas dire qu'on n'a pas été réactifs», a-t-elle martelé devant la commission d'enquête, qui a déjà entendu tous les directeurs généraux de la Santé depuis 2003 et plusieurs experts et chercheurs.
L'ex-ministre a assuré avoir «préparé notre système de santé» avant son départ, alertant l'Elysée et Matignon «autour du 11 janvier». Elle a dit avoir ensuite demandé un état des lieux de tous les stocks d'équipements de protection, et notamment de masques, et avoir lancé une première commande de un million de FFP2.
«Il y a eu un défaut d'anticipation et on a manqué de tout», a réagi mercredi Damien Abad, président du groupe LR à l'Assemblée nationale, sur CNews.
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Pour l'eurodéputé RN Jordan Bardella, interrogé sur Europe 1, «le gouvernement a menti pour dissimuler les pénuries de masques» et «manifestement, la ministre de la Santé (Agnès Buzyn) a menti aussi».
Xavier Bertrand, qui a occupé le poste de 2005 à 2007 puis de 2010 à 2012, sera à son tour interrogé jeudi.