«Le confinement a provoqué des évolutions spectaculaires dans la délinquance», a reconnu le préfet de police de Paris, Didier Lallement. Et le trafic de drogue n'échappe à la règle, puisqu'il s'est métamorphosé dans la capitale, suscitant l'inquiétude des autorités.
«Une adaptation du trafic de drogue» évoquée rapidement par Didier Lallement, le 28 avril, devant les élus lors du conseil de Paris. Selon le responsable de la sécurité dans la capitale et en petite couronne, ses inspecteurs ont en effet noté «une baisse du nombre de clients et des livraisons», qui s'explique en particulier par le «ralentissement des transports».
«Le confinement a désorganisé le trafic de stupéfiants pendant une semaine, voire dix jours. Mais il s’est vite remis en marche, grâce notamment à l'hyper-proximité», indique à CNews Colombe Brossel, l'adjointe à la maire de Paris chargée de la sécurité.
Près de 50 signalements
Car en période de confinement, «le deal ne se fait plus dans la rue mais à l'intérieur des immeubles : dans les cages d'escaliers, les jardins intérieurs, les caves, les parkings...», détaille Colombe Brossel. Une situation «doublement insupportable» selon l'adjointe, «les habitants concernés devant être respectueux du confinement alors que leur lieu d'habitation est devenu un point de deal».
Les élus de la capitale, d'après les signalements faits par des habitants, des associations de riverains ou encore des gardiens d'immeubles, ont ainsi fait remonter à la police près d'une cinquantaine de sites où des trafics de drogues ont régulièrement lieu depuis la mi-mars.
Au-delà du nombre, c'est surtout les endroits où s'installent les dealers qui inquiètent les autorités. «D'après ce qu'on a entendu, une partie importante de ces adresses, environ 60 %, n'était pas connu auparavant pour être des points de deal», indique Colombe Brossel. Malgré l'interdiction de circuler, le réseau de la drogue semble donc avoir réussi à s'étendre.
D'après les premières données, il n'y a pas que les quartiers populaires des 18e, 19e et 20e arrondissements qui sont concernés, mais bien l'ensemble de la capitale. Des signalements ont aussi eu lieu sur la rive gauche, notamment dans les 13e et 15e arrondissements.
En réaction, Didier Lallement a annoncé avoir «mobilisé 350 enquêteurs de la police judiciaire». Un redéploiement de forces rendu possible par «le ralentissement des grandes enquêtes pendant le confinement». Les agents de la PJ ont ainsi pu travailler en masse sur des «enquêtes de proximité».
Une préoccupation en vue du déconfinement
Mais pas question de passer à l'action pour le moment, il ne s'agit en effet que de missions d'observation et de renseignement. «La situation actuelle, très compliquée et parfois avec des tensions, ne se prête pas aux interventions», souffle-t-on à la préfecture de police de Paris.
Et même si, pour l'instant, les autorités n'ont pas détecté de rixes entre bandes ou de «guerres de territoire», le problème va toutefois devoir être réglé rapidement, en vue du 11 mai. «C'est un des vrais sujets de sortie du confinement, car on ne peut pas laisser les habitants dans des immeubles devenus des lieux de deal installés et organisés. C'est préoccupant car c'est très compliqué de faire sortir des trafiquants d'espaces privés», pointe Colombe Brossel.
S'il a appelé à ne «pas tirer d'analyses définitives» sur ces nuisances qui pourraient disparaître avec le temps, Didier Lallement devrait révéler prochainement les analyses sur ces points de deal aux élus et maires d'arrondissements. Viendra ensuite le plus difficile, l'intervention des forces l'ordre pour démanteler ces trafics en plein cœur de Paris.