Si un vote avait été organisé en prison lors des dernières élections européennes, les prisonniers ne reprendront pas le chemin des urnes aux municipales, qui se tiennent les 15 et 22 mars prochain, faute de «délais trop courts».
Deux-tours à une semaine d'intervalle, 36.000 maires à élire et autant de lieux de vote potentiels... Les autorités évoquent des «difficultés organisationnelles». Et ce, même dans le cas d'une maison d'arrêt comme Albi, qui compte une centaine de détenus : «Si chacun était inscrit dans une commune différente, et qu'il fallait envoyer le bulletin le jour J dans chaque lieu de vote, ça aurait été compliqué», explique Amin Mbarki, chef du département des politiques sociales et des partenariats à la direction de l'administration pénitentiaire (DAP).
Aux Européennes, le scrutin à un seul tour et le fait que les listes étaient nationales avait rendu la tâche plus aisée. Les bulletins des détenus avaient tous été acheminés au ministère de la Justice, dans le 1er arondissement de Paris, et les résultats rattachés à ce seul secteur.
La DAP justifie également sa décision par le fait que sa «préoccupation première» soit d'inscrire les prisonniers sur les listes électorales. Elle explique que, lors des Européennes de 2019, de nombreux prisonniers n'avaient pas pu voter : «Sur près de 10.000 optants, ce sont finalement 4 550 qui ont voté au scrutin européen, soit environ 8 % des détenus non déchus de leurs droits civiques».
Des arguments contestés par François Korber, délégué général de l'association d'aide aux détenus Robin des Lois : «Ce renoncement n'a aucun justificatif technique (...) c'est de l'enfumage ! Les prisons n'intéressent personne», affirme-t-il.
Des contraintes levées «dès 2021»
Les 15 et 22 mars, les prisonniers inscrits sur les listes électorales pourront tout de même voter par procuration ou directement en bureau de vote, s'ils bénéficient d'une permission de sortir. Néanmoins, ces deux moyens, permis depuis 1994, sont très difficiles à mettre en oeuvre et ne se sont jamais traduits par une importante participation.
Pour inverser la tendance, l'administration pénitentiaire assure que certaines contraintes seront levées «dès 2021». En ce qui concerne les procurations, la loi prévoit que les détenus n'auront plus l'obligation d'être inscrits sur la même commune que leurs mandats. De plus, à son arrivée en détention, un prisonnier sera inscrit «systématiquement» sur une liste électorale.