Une semaine après les vives critiques émises par les députés de la majorité à son encontre, sur fond de brouille autour du congé de deuil pour le décès d'un enfant, Emmanuel Macron doit recevoir, ce mardi 11 février, les parlementaires de son camp à l'Elysée. L'objectif : recoller au plus vite les morceaux avec ses troupes.
Le rendez-vous «prévu de longue date», prend-t-on néanmoins le soin de préciser dans l'entourage du président de la République, est inscrit à 20h à son agenda et doit avoir lieu dans la salle des fêtes du palais présidentiel.
Des élus LREM, en passant par ceux de l'UDI et du MoDem, tous ont été invités à écouter la parole du chef de l'Etat, et beaucoup espèrent que cette rencontre sera l'occasion de s'expliquer enfin avec lui.
Un couac et une déflagration
A l'origine de ce que d'aucuns qualifient de véritable «désamour» entre Emmanuel Macron et sa base, le mémorable rejet, le 30 janvier dernier et par 40 voix contre 38, d'une proposition d'un élu du groupe UDI-Agir d'instaurer un congé parental pour deuil d'un enfant de douze jours, contre cinq aujourd'hui.
Lors de la discussion en séance, la ministre du Travail, Muriel Pénicaud, avait motivé son refus en faisant valoir qu'il s'agissait «d'un congé payé à 100 % par l'entreprise», et a défendu à la place un don de RTT par les collègues pour aider les parents en deuil.
Une proposition qualifiée aussitôt de «pro-business» par des oppositions et une opinion publique indignées. Fait notable : le patron du Medef lui-même, Geoffroy Roux de Bézieux, s'était dit dans la foulée favorable à l'extension de ce congé.
La goutte qui avait fait déborder le vase des députés, qui avaient pourtant adopté cette position en concertation avec le gouvernement, est venue lorsque Emmanuel Macron a demandé à ce que ce dossier soit traité «avec humanité». A ce stade, et face au tollé suscité, il était prévu que la majorité appuie la proposition de loi UDI lorsqu'elle repassera au Sénat.
Finalement, ce mardi 11 février, les députés LREM vont proposer de porter le congé pour deuil d'un enfant à trois semaines pour tous les actifs, contre cinq jours actuellement, a confirmé le député Mounir Mahjoubi.
Des députés dépités
En attendant, cette sortie présidentielle reste toujours en travers de la gorge de certains élus. «Ils se sont sentis lâchés», a confié un cadre de la majorité, cité par le Parisien.
Une première explication a ainsi d'abord eu lieu mardi 4 février avec le Premier ministre Edouard Philippe à l'Assemblée, lors d'une réunion à huis-clos du groupe LREM. Et selon les témoignages rapportés dans la presse, les échanges ont pour le moins été houleux.
Plusieurs députés qui étaient présents lors du vote litigieux sur le deuil parental ont notamment pris la parole, pour refuser qu’on dise «qu'ils sont godillots», ou «qu’ils ont voté par loyauté», tout en rejetant l’idée d’une «erreur». Leur explication : la proposition centriste d’allongement du congé était «mal ficelée», et cela dès le départ, selon eux.
Au moment où les élus LREM subissent sur le terrain nombre d'actes malveillants, lorsque ce ne sont pas des insultes ou des agressions, les griefs n'ont pas non plus épargné le chef de l'Etat. Du jamais vu de la part de la majorité depuis le début du quinquennat.
A quasiment un mois des municipales de mars, mais aussi dans la perspective de la présidentielle 2022, l'heure est donc plus que jamais au «rabibochage» entre le président de la République et ses troupes.
«Mardi, le président devrait faire son mea culpa, pointer la responsabilité collective dans cette affaire, et aussi dresser le cap des mois à venir. Car on doit avancer ensemble», décrypte un ministre de haut rang sous couvert de l'anonymat, toujours cité par le Parisien.
une hémorragie à contenir
Mais au-delà des bonnes volontés, Emmanuel Macron va devoir surtout convaincre «ses» élus. Car, rien que la semaine dernière, ce sont trois députés qui ont quitté le navire LREM. Et si ceux-ci ne remettent pas en cause les réformes elles-mêmes, tous déplorent en revanche d'être «totalement inaudibles».
Après le départ du député de Seine-Maritime Xavier Batut, qui a décidé de se mettre «en retrait» du parti, et avant lui celui de Paula Forteza, élue des Français d’Amérique latine et soutien du candidat à Paris et désormais exclu de LREM Cédric Villani, c'est Frédéric Tuffnell, élue de Charente-Maritime, qui a jeté l'éponge en expliquant que sa décision a en partie été motivée par le manque d'écoute de son parti concernant la réforme des retraites.
A date, les effectifs du groupe LREM et apparentés à l'Assemblée nationale sont désormais de 300 membres, contre 314 en 2017 (en comptant le président de l'Assemblée, Richard Ferrand), alors que la majorité absolue est à 289 sièges. Contenir l'hémorragie semble plus que jamais vital.