Le système éducatif français sur le grill. C'est ce mardi 3 décembre que doivent être dévoilés les résultats de l'enquête internationale Pisa (Programme for International Student Assesment) réalisée en 2018.
Tous les trois ans, sous l'égide de l'OCDE, cette évaluation internationale mesure et compare les compétences des élèves âgés de 15 ans dans trois domaines principaux : compréhension de l'écrit, mathématiques et sciences.
L'année dernière, l'enquête a été menée dans 79 pays, auprès de 600.000 élèves. En France, 6.300 élèves, issus de 252 établissements, sont concernés.
Au-delà des performances établies, qui permettent à la France de se situer par rapport aux autres pays, les scores permettent aussi d'évaluer les élèves entre eux, de toutes les classes sociales, au sein même de chaque pays.
Alors que l'enquête PISA existe maintenant depuis 2000, comparer les résultats dans le temps permet, aussi, d'apporter un éclairage décisif sur l'efficacité, ou non, des politiques éducatives mises en place au fil des ans.
Les petits Français ont une compréhension de l'écrit légèrement au-dessus de la moyenne
Tour à tour, lors de chaque édition, un domaine, dit «domaine majeur», fait l'objet d'une analyse plus approfondie.
Ainsi, après les sciences pour l'étude PISA 2015, le domaine majeur choisi pour cette dernière édition est la compréhension de l'écrit.
Avec un score de 493 points, la France se situe ici légèrement au-dessus de la moyenne de l'OCDE (487 points) - au même niveau que l'Allemagne, la Belgique, le Portugal, la République tchèque ou la Slovénie.
L'Hexagone reste toutefois bien en deçà de la Chine (du moins des régions de Beijing, Shanghai, Jiangsu et Zhejiang, les seules testées, ndlr), de Singapour, du Canada, de l'Estonie, de la Finlande ou de l'Irlande, qui, avec un score moyen d'environ 520 points, trustent les premières places du palmarès.
Le score moyen français se situe, en revanche, bien au-dessus du Maroc (359), du Liban (353), de la République dominicaine (342) ou des Philippines (340) qui ferment la marche.
Enfin, il reste stable comparé à la précédente édition Pisa 2015, où le score moyen français était alors de 499 points.
A noter qu'en France, concernant les autres matières, les élèves ont également obtenu des résultats légèrement supérieurs à la moyenne de l'OCDE en mathématiques (495 points, contre 489) et en sciences (493, contre 489).
Des résultats encore très stables dans le temps puisqu'en 2015, le score moyen français en maths était de 493, celui de sciences de 493 également.
Le milieu socio-économique, source de profondes inégalités en France
Dans le domaine majeur qu'est la compréhension de l'écrit, le score moyen des élèves français cache toutefois de profondes disparités socio-économiques entre les élèves eux-mêmes. Un constat déjà observé lors des éditions précédentes et qui se répète donc à nouveau cette année.
Dans le détail, ce sont ainsi et très exactement 107 points qui, dans notre pays, séparent en moyenne un élève issu d'une famille favorisée de celui venant d'un milieu modeste.
L'étude souligne d'ailleurs à cet égard, «qu'il s'agit tout simplement de l'un des plus importants écarts liés au milieu socio-économique parmi tous les pays de l'OCDE», où une différence moyenne de 89 points est observée.
Plus préoccupant, l'enquête relève que «la performance moyenne en compréhension de l'écrit en France n'a pas évolué de manière sensible depuis la première édition du test PISA en 2000».
En compréhension de l'écrit, cette stabilité apparente de la performance sur l'ensemble de la période masque même des évolutions divergentes selon les élèves.
Alors que le niveau des meilleurs élèves a eu tendance à augmenter sur la période, celui des élèves les plus faibles a au contraire baissé.
Enfin, parmi les élèves issus d'un milieu modeste mais ayant de bons résultats scolaires, un sur cinq ne prévoit pas de faire des études supérieures, alors que cette proportion est très faible chez les élèves de familles favorisées.
Le système français encore plus discriminant pour les jeunes issus de l'immigration
Alors qu'en France, environ 14 % des élèves étaient issus de l'immigration en 2018, elle est l'un des pays où l'on trouve une forte proportion d’élèves immigrés issus d’un milieu socio-économique défavorisé.
Dans l'Hexagone, près d'un élève immigré sur deux est issu d’un milieu défavorisé, contre trois sur huit en moyenne dans les pays de l’OCDE.
Concernant la compréhension de l’écrit, les élèves issus de l’immigration ont, en France, en moyenne 52 points de moins comparé aux élèves autochtones. Dans l'ensemble des pays de l'OCDE, cette différence moyenne est de 41 points.
Pour autant, souligne l'étude, «même si les élèves immigrés ont tendance à être issus de milieu socio-économique désavantagé, certains sont capables d'atteindre l'excellence scolaire».
En ce sens, environ 13 % des élèves immigrés ont obtenu un score en compréhension de l’écrit qui les classe parmi le premier quart des meilleures performances obtenues par les élèves en France, même si la moyenne dans l'OCDE est autour des 17 %.
des stéréotypes de genre encore tres marqués
Moins vrai en compréhension de l'écrit, les élèves les plus performants pâtissent par ailleurs encore en France de forts stéréotypes de genre concernant les matières scientifiques et mathématiques.
En effet, alors que dans l'Hexagone, un garçon sur trois souhaite travailler comme ingénieur ou comme scientifique à l'âge de 30 ans, cette proportion est de seulement de une sur six chez les filles.
En outre, seulement 6 % des garçons, mais presqu’aucune fille, souhaitent plus tard travailler en France dans des professions liées aux technologies de l'information et de la communication (TIC).
L'étude est là encore sans appel : «les filles expriment plus souvent que les garçons un manque de confiance en elles. En France, près de trois filles sur quatre ont déclaré que lorsqu'elles échouent, elles ont peur de ne pas avoir assez de talent, ou elles doutent de leurs plans pour l'avenir. Seulement un garçon sur deux est dans ce cas», souligne-t-elle.
un manque de soutien déploré dans l'hexagone
Un manque de confiance qui pourrait trouver une partie de son origine dans la manière dont sont mis en place les apprentissages.
L'étude révèle en effet que la France est l'un des pays où les élèves ressentent le moins de soutien de la part de leurs enseignants pour progresser dans leur parcours.
Dans l'Hexagone, moins d'un élève sur quatre déclare ainsi que son professeur lui indique ses points forts, lorsque cette proportion est d'un sur trois, en moyenne, dans les pays de l'OCDE.
De même, moins de deux élèves sur cinq en France déclarent que leur professeur leur indique souvent ou toujours comment améliorer leurs résultats, alors que dans les pays de l'OCDE, la moyenne se situe plutôt autour d'un élève sur deux.
Les petits Français sont enfin plus souvent préoccupés par les problèmes de disciplines qui perturbent leurs cours, que dans la plupart des autres pays de l’OCDE.
Ainsi, en France, un élève sur deux a déclaré qu'il y avait du bruit et du chahut dans la plupart ou la totalité des cours, alors que la moyenne est d'un élève sur trois dans les pays de l’OCDE.