Entre ouverture et fermeté, le Premier ministre Edouard Philippe doit annoncer, ce mercredi 6 novembre, des mesures très attendues sur l’immigration.
Après les débats engagés le mois dernier au Parlement, il devrait ainsi présenter vingt dispositions en la matière à l’issue d’un comité interministériel dédié.
Parmi elles, des quotas pour ajuster les arrivées en fonction des besoins économiques, ou de nouvelles règles d’accès aux soins des étrangers.
D’autres mesures, plus spécifiques, devraient quant à elles revoir l’immigration familiale ou réduire l’attente des demandeurs d’asile. Le tout avec l’ambition d’engager, aussi, l’ensemble des pays de l’Union européenne.
Des quotas pour les travailleurs étrangers fixés chaque année
Carrossiers automobiles, géomètres, couvreurs... Des métiers qui peinent à recruter, obligeant les entreprises à faire appel à de la main d’œuvre étrangère.
Alors qu’en 2019, 150.000 emplois n’étaient pas pourvus faute de candidats, Edouard Philippe devrait annoncer la mise en place de «quotas», pour définir, pour chaque métier en tension, le nombre de places ouvertes à l’immigration professionnelle.
En 2008, une liste de ces emplois ouverts aux étrangers non ressortissants d’un Etat membre de l’UE avait été fixée mais est aujourd’hui obsolète.
L’idée est donc de l’ajuster chaque année au plus près des besoins via un débat au Parlement. Une concertation avec Pôle emploi et les partenaires sociaux devrait bientôt s’engager.
L’accès aux soins des demandeurs d’asile mieux contrôlé
Alors qu’aujourd’hui les demandeurs d’asile peuvent accéder à la Protection universelle maladie (PUMa) dès le dépôt de leur demande, cela ne devrait plus être le cas à l’avenir.
Le gouvernement devrait en effet fixer un délai de carence de trois mois avant qu’ils puissent en bénéficier. En deçà de ce délai, les demandeurs d’asile n’auraient accès qu’aux soins urgents et vitaux.
Si l’Aide médicale d’Etat (AME), offre de soins réservée aux sans-papiers, n’est, elle, pas concernée, et que le projet est censé limiter les demandes d’asile qui ont explosé (+ 20 % en 2018), il a tout de suite provoqué une levée de boucliers chez les associations, qui estiment au contraire qu’il fragilise des gens déjà vulnérables.
Les critères sur le regroupement familial revus et corrigés
Poids financier en prestations sociales pour les uns, axe majeur de la politique nationale d’accueil pour les autres, le regroupement familial devrait quoi qu’il en soit voir ses critères modifiés.
Créé en 1976, il permet à un ressortissant étranger en règle d’être rejoint par des membres de sa famille. Mais, au motif de lutte contre la fraude, le gouvernement devrait redéfinir les «liens privés et familiaux» (conjoint(e), enfant(s), parents etc.) qui, suivant les cas, peuvent permettre à un proche de venir en France.
Au total, 90.000 individus sont concernés chaque année, sur les 250.000 titres de séjour délivrés.
Davantage de moyens pour réduire les délais d’examen des dossiers
C’était l’un des objectifs de la loi Asile et Immigration. Votée en 2018, elle avait réduit de 120 à 90 jours le délai légal pour déposer une demande d’asile.
Or, dans un contexte de forte augmentation des demandes, il faut toujours compter environ un an d’attente.
C’est pourquoi, Edouard Philippe devrait annoncer des crédits supplémentaires pour l’Office français de protection des réfugiés et des apatrides (Ofpra) et la Cour nationale du droit d’asile (CNDA).
Une coopération entre les Etats européens renforcée
Comme il l’aurait indiqué, lundi, devant des parlementaires de la majorité, Edouard Philippe devrait enfin acter une nouvelle approche migratoire au niveau européen. A ce titre, une «compensation financière» pour les pays qui doivent prendre en charge les demandeurs d’asile à leur arrivée sur leur territoire devrait être détaillée.
Par ailleurs, le gouvernement français pourrait engager une révision de l’espace Schengen et de la règle selon laquelle le pays responsable de la demande d’asile d’un migrant est le premier État membre où sont conservées les empreintes digitales. Dans le même temps, les moyens de Frontex (l’agence chargée du contrôle et de la gestion des frontières extérieures de l’espace Schengen) seraient augmentés.