«Je me suis retrouvée orpheline», c'était «ma deuxième maison»: des catholiques qui avaient l'habitude de prier régulièrement à Notre-Dame de Paris évoquent un «manque» depuis l'incendie de leur cathédrale.
Ils n'étaient pas très nombreux, les «fidèles» de Notre-Dame. Il faut dire que la cathédrale accueillait davantage pèlerins, touristes et personnalités. Elle n'était plus une paroisse depuis 1995, et donc baptêmes, mariages et enterrements n'y étaient plus célébrés, sauf exceptions. Pour autant, la liturgie des offices, le cadre, l'histoire, ou tout simplement la proximité attiraient des pratiquants.
Parmi eux, Michèle Chevalier, 70 ans, assistait aux vêpres et à l'office du soir de Notre-Dame, «presque tous les jours depuis 10 ans», raconte-t-elle à l'AFP. «J'y trouvais de la sérénité». Et une «petite famille. Il y avait les habitués du lundi, du mardi, du mercredi. Chacun avait sa place», souligne-t-elle.
Elle était d'ailleurs à la messe, cette fin d'après-midi du 15 avril, où une partie de l'édifice a été ravagée par les flammes. Et raconte «l'alarme qui retentit dans toutes les langues», l'office interrompu puis repris quelques minutes, dans le noir, «le prêtre qui continue à lire l'Evangile», puis l'évacuation sur le parvis et la sidération, minute après minute, de voir le bâtiment s'embraser.
«Après, je me suis retrouvée orpheline, c'était comme un deuil. Je ne savais plus quoi faire», explique cette femme. «Tout l'été, ça a été une galère pas possible», poursuit-elle, en énumérant les paroisses où elle tente de retrouver des repères. C'est chose faite pour elle depuis septembre, en l'église de Saint-Germain l'Auxerrois, où des offices sont célébrés par le clergé et avec la Maîtrise de Notre-Dame. «J'arrive à prier. Mais c'est pas pareil».
«Plus la même dimension»
Elle y a retrouvé Aimé Diani, designer de costumes, qui venait tous les jours à Notre-Dame, notamment pour aider les bénévoles. «On est en manque. Etre en communion dans Notre-Dame, c'est quelque chose ! C'est beau, c'est angélique, c'est fleuri !», s'exclame-t-il.
Marceline Maricel, a l'impression d'avoir perdu sa «deuxième maison». «C'est l'église où je me sentais bien», dit cette femme de 62 ans, qui venait «entre 10 à 15 fois dans le mois».
Renaud, 52 ans, greffier depuis 25 ans dans le quartier, était, lui, un fidèle du midi. «Trois ou quatre fois par semaine, depuis au moins 10 ans». Il aimait le «passé historique, religieux, culturel et spirituel» d'un édifice dans lequel «sont passés beaucoup de saints». Il se rend désormais à l'église Saint-Séverin, à quelques centaines de mètres. «Ca n'a plus cette même dimension», relève-t-il.
Nadia Latouche, secrétaire de direction, adorait avant tout «l'office du soir, avec les chants grégoriens !». «Ne plus pouvoir rentrer, la flèche qui n'est plus là... Il y a quand même un manque. On a un petit pincement au coeur».
Ce «manque», Albertine Dieme, 48 ans, le ressent aussi profondément. Assise sur un banc, face à la bâtisse gothique de 850 ans, elle raconte qu'elle y a fait sa confirmation. «Rire, pleurer, je partageais toutes mes émotions avec Notre-Dame. J'aimais aussi le fait qu'il y avait toutes les nationalités», ajoute-t-elle.
Michèle Chevalier attend maintenant sa restauration et sa réouverture: «j'ai déjà un certain âge. S'il le faut, on ira en déambulateur !», s'esclaffe-t-elle.
En attendant, les responsables du diocèse espèrent proposer au plus tôt, sur le parvis, ou dans les locaux tout proches de l'hôpital Dieu, un accueil au sein d'un sanctuaire marial, avec un espace pour la prière ou les intentions de prière. «Il s'agit d'accueillir au mieux visiteurs et pélerins», affirme à l'AFP le vicaire général Benoist de Sinety.
C'est lui qui représentera le diocèse au sein du futur établissement public chargé de la restauration de la cathédrale. Et entend bien être «force de propositions».