Plus d'un an après la loi asile et immigration, la politique d'accueil des étrangers sera ce lundi soir au programme d'une réunion à laquelle doivent assister l'ensemble du gouvernement, dont le Premier ministre, et tous les parlementaires de la majorité. Emmanuel Macron devrait également y participer.
Tous sont attendus à partir de 18h30 dans les jardins du ministère chargé des Relations avec le Parlement, à Paris. Selon une source gouvernementale, «ce sera un petit recalage sur la méthodologie de l'acte 2 [et] sur les priorités de la rentrée», en vue notamment de préparer le débat sur l'immigration (sans vote) qui aura lieu à l'Assemblée nationale le 30 septembre prochain.
L'objectif de cette réunion ? «Déconstruire un certain nombre d'idées reçues» face aux sirènes de l'extrême droite, selon le député LREM Aurélien Taché sur France Info, mais aussi «dire à nos concitoyens qu'il y aura des migrations à l'avenir, qu'on saura y faire face».
Un rendez-vous qui intervient sans grande surprise, Emmanuel Macron ayant régulièrement évoqué le sujet ces derniers mois. Début janvier, il envisageait déjà des «objectifs annuels» d'immigration, références implicites aux quotas ; en mars, il proposait aux «citoyens d'Europe» de «remettre à plat l'espace Schengen»; et à l'issue du grand débat national, il disait vouloir «rebâtir un patriotisme inclusif». Aujourd'hui, il veut faire de «l'insécurité culturelle» – c'est le terme employé – l'une des priorités du quinquennat, rapporte L'Opinion.
L'eurodéputée @NathalieLoiseau (LREM) sur le nouvel intitulé du portefeuille du commissaire européen à l'#immigration ["protection du mode de vie européen"] : "Oui, ça me choque, nous demandons à Ursula von der #Leyen de le revoir" #le79Inter pic.twitter.com/bzSRl873MI
— France Inter (@franceinter) September 16, 2019
Une stratégie pour les municipales
En substance, Emmanuel Macron veut notamment désengorger la demande d'asile (123.000 en 2018, + 22% par rapport à 2017). Dès lors qu'il faudra, dans le futur, faire face à des vagues migratoires sans précédent, dues aux guerres ou au dérèglement climatique, il faut aujourd'hui limiter les demandes d'asile qui n'auraient pas lieu d'être, martèle l'exécutif. Dans son viseur : les Albanais et les Géorgiens, qui viennent de pays considérés comme sûrs. L'objectif à terme est de décourager les ressortissants d'Etats en paix de se rendre sur le territoire français.
Autre cible de Macron : l'Aide médicale d'Etat (AME), qui permet l'accès aux soins des migrants en situation irrégulière. Régulièrement critiqué pour son coût (950 millions d'euros en 2019), ce dispositif est pointé du doigt depuis quelques jours. En particulier par la droite et de l'extrême droite, qui estiment qu'il «incite[rait] à l'immigration et au tourisme médical» et renforcerait «les filières» clandestines.
Certains ont même affirmé que l'AME remboursait la PMA et la chirurgie esthétique – ce qui est totalement faux. Le patron de LREM, Stanislas Guérini, a lui-même évoqué à tort des «abus» concernant des prothèses mammaires remboursées par l'AME, alors qu'en réalité, elles ne le sont qu'après une chirurgie réparatrice ou un cancer.
Reste que le gouvernement considère l'option de réformer le dispositif, assurant aux Echos qu'«il y a trop d'opérations non urgentes que demandent des soi-disant demandeurs d'asile». Le doute n'est plus permis : la guerre est déclarée contre «l'attractivité du territoire» français et «le phénomène de migration sanitaire».
En termes de stratégie politique, parler immigration permet aussi, pour le camp Macron, de marcher sur les plates-bandes du Rassemblement national pour tenter de lui siphonner des voix lors des municipales de mars. Selon la présidente du parti d'extrême droite, Marine Le Pen, ce ne serait donc qu'«une tentative électoraliste». Mais qui, concrètement, pourrait bien accoucher d'une nouvelle loi immigration, après une première jugée aussi «inefficace» que «dangereuse» par les associations.
Un rassemblement contre la loi asile et immigration, en février 2018, alors que Gérard Collomb est encore ministre de l'Intérieur © Zakaria ABDELKAFI / AFP