La ministre des Armées Florence Parly doit détailler jeudi la nouvelle stratégie spatiale militaire de la France, évoquée à grands traits mi-juillet par Emmanuel Macron, qui compte muscler les capacités françaises de surveillance et d'auto-défense dans l'espace.
Florence Parly est attendue à 12H00 (10H00 GMT) au Commandement de défense aérienne et des opérations aériennes (CDAOA), sur la base de Lyon Mont-Verdun, où elle annoncera les grandes orientations militaires françaises dans l'espace, un milieu essentiel pour les armées mais devenu un nouveau théâtre de confrontation entre puissances.
«Nous renforcerons notre connaissance de la situation spatiale, nous protègerons mieux nos satellites, y compris de manière active», avait affirmé M. Macron le 13 juillet, ouvrant la voie à une surveillance renforcée de l'espace et à l'utilisation de capacités offensives en riposte à une menace.
«Il s'agit de décourager, voire de se protéger activement des agressions de nos adversaires potentiels», a fait valoir Mme Parly le 16 juillet à l'Assemblée nationale, en rappelant le cas du «satellite-espion» russe Louch-Olympe qui avait tenté en 2017 de s'approcher du satellite militaire franco-italien Athena-Fidus.
Pour autant, «le développement d'armes pointées vers la Terre depuis l'espace ne fait pas partie de nos objectifs», conformément aux traités internationaux prévoyant un usage pacifique de l'espace, a ajouté la ministre, qui devrait évoquer jeudi les moyens concrets dont compte se doter la France pour défendre ses satellites.
Espionnage, brouillage, cyberattaques, armes antisatellites... L'espace, indispensable aux opérations militaires, est devenu un champ de confrontation entre nations.
Les plus grandes puissances spatiales mondiales - États-Unis, Chine et Russie - sont engagées depuis plusieurs années dans une course pour la domination de l'espace.
Le président Macron a d'ores et déjà annoncé la création en septembre prochain d'un «grand commandement de l'espace» au sein de l'armée de l'Air, qui «deviendra à terme l'armée de l'Air et de l'Espace».
«Enjeu de souveraineté»
Ce nouveau commandement, qui sera à terme installé à Toulouse, centre névralgique de l'aérospatiale française, regroupera «tous les moyens qui sont dispersés dans nos armées et qui contribuent à la bonne utilisation des moyens spatiaux», selon Florence Parly.
Paris se place ainsi dans le sillon de Washington, qui prévoit de mettre sur pied une «Space Force» dans le giron de l'armée de l'Air, exclusivement consacrée aux activités spatiales (satellites, fusées, armes, technologies...).
«Défendre nos satellites civils comme militaires dans l'espace, c'est-à-dire être capable de voir, d'éviter, d'agir et de neutraliser une menace est un enjeu de souveraineté nationale et européenne, chacun pouvant aisément imaginer le chaos sur Terre si soudainement tous nos moyens de transport, nos moyens de communication et nos transactions bancaires étaient paralysés», soulignent les députés Olivier Becht et Stéphane Trompille, auteurs d'un récent rapport sur la défense spatiale.
Les deux parlementaires suggèrent notamment de renforcer la surveillance de l'espace depuis l'espace, via «l'emport de capteurs d'approche sur nos satellites» ou «la mise en orbite de satellites patrouilleurs», mais aussi de développer «les moyens de surveillance depuis la Terre» avec de nouveaux radars et télescopes.
Sur le plan budgétaire, Emmanuel Macron a promis que «les nouveaux investissements indispensables seront décidés» pour financer le renforcement des capacités spatiales militaires françaises. La ministre des Armées devrait préciser jeudi le montant de l'effort budgétaire consenti.
La Loi de programmation militaire française (PME) 2019-2025 prévoit en l'état un budget de 3,6 milliards d'euros pour le spatial de défense. Il doit notamment permettre de financer le renouvellement des satellites français d'observation CSO et de communication (Syracuse), de lancer en orbite trois satellites d'écoute électromagnétique (CERES) et de moderniser le radar de surveillance spatiale GRAVES.
Avec ses deux milliards d'euros d'investissements annuels dans le spatial militaire et civil, la France reste loin derrière le trio de tête du secteur : les États-Unis investissent annuellement 50 milliards de dollars dans le spatial, la Chine 10 milliards et la Russie 4 milliards, selon les chiffres du gouvernement français.