Une réplique virulente aux critiques internes, mais aussi l'esquisse d'une évolution: Jean-Luc Mélenchon a réaffirmé dimanche son autorité de chef de file devant les militants de La France insoumise réunie en assemblée représentative à Paris, un mois après la déroute aux européennes.
La parole du leader et «tribun» - appellation qu'il revendique hautement - de La France insoumise était attendue par les militants, qui n'avaient pas entendu Jean-Luc Mélenchon s'adresser directement à eux après le score de 6,3% des voix au scrutin européen, très loin des 19,6% de la présidentielle et des 11,1% aux législatives de 2017.
«Mon rôle est consubstantiel au mouvement», notamment parce que «c'est moi qui étais candidat à la présidentielle», a-t-il lancé devant 240 cadres et militants réunis au bois de Vincennes. Des propos en forme de rappel à l'ordre après les critiques internes qui ont suivi les élections.
Il a d'ailleurs vilipendé leurs auteurs, parmi lesquels la députée Clémentine Autain, qui réclame une ligne moins clivante et les marqueurs traditionnels de gauche, mais aussi des cadres demandant plus de démocratie et de transparence dans le mouvement - un problème lancinant qui a mené à plusieurs départs ces derniers mois.
«Une force, LFI, est là, qu'aucune autoflagellation de convenance de la gauche officielle mondaine ne viendra abattre!», s'est-il exclamé. Ceux qui veulent «les délices des batailles pour les virgules, des couteaux tirés dans les couloirs, se sont trompés d'adresse».
Mélenchon, dont l'éruption de colère lors d'une perquisition à l'automne avait été filmée et abondamment commentée, a aussi balayé comme «puérile» l'idée que les «difficultés» de LFI viendraient «parce que je ne suis pas assez poli».
Au-delà de la forme, martiale, Jean-Luc Mélenchon a donné quelques gages sur le fond pour apaiser les tensions. «J'avoue que j'ai consacré beaucoup d'énergie au groupe parlementaire», a-t-il dit, rappelant l'élection de Mathilde Panot comme vice-présidente du groupe parlementaire pour le décharger de certaines tâches. Et à LFI, «ce n'est plus moi qui ouvrirai toutes les réunions».
Critiques de militants
Ses lieutenants ont aussi annoncé au cours du week-end des améliorations du fonctionnement interne: une coordination des différentes instances confiée au député et proche de Jean-Luc Mélenchon Adrien Quatennens; une agora politique pour faire dialoguer les militants, la direction et des experts sur la ligne et la stratégie; ou encore une assemblée tous les trois mois des groupes d'action locaux, qui disposeront aussi d'une enveloppe annuelle et attribuée de manière participative de 100.000 euros.
Ce weekend, peu de militants ont remis ouvertement en cause Jean-Luc Mélenchon. Son nom n'a quasiment pas été prononcé durant les débats.
Mais les intervenants au micro, tout en saluant les annonces, ne se sont pas privés d'attaquer certains manquements. Un militant, applaudi, s'est dit «déçu d'avoir fait 300 km pour faire quelques corrections sémantiques», en référence à la modification à la marge des textes préparés en amont.
Un autre a demandé «une assemblée constituante dans les plus brefs délais», dans la continuité d'une note interne d'une quarantaine de cadres et militants: «Nous ne pouvons pas faire l'économie d'une refondation, sinon on va vers la désaffection de très nombreux militants», a-t-il affirmé.
L'une des signataires de cette note, la responsable de l'Ecole de formation insoumise Manon Le Bretton, a noté dimanche auprès de l'AFP des évolutions positives mais regretté des «demi-mesures», «des solutions-clé en main alors que les militants réclamaient de pouvoir davantage intervenir».
La députée Clémentine Autain a aussi affirmé «ne pas savoir» comment Adrien Quatennens avait été promu «coordinateur» de LFI la veille. «C'est mon boulot de faire ça, si on peut s'économiser» des disputes, a assumé Mélenchon.
L'écologiste Sergio Coronado, ancien candidat aux européennes, a pour sa part critiqué «le rétrécissement de l'équipe", tout en saluant l'ouverture aux autres forces, sur le terrain, du texte consacré aux élections municipales.
Jean-Luc Mélenchon, lui, garde en point de mire la présidentielle: «Les élections municipales, de même que les départementales et régionales, ont du sens en tant que préparation à l'auto-organisation populaire que nous souhaitons dans tout le pays, jusqu'à l'élection de 2022".