Salariés, syndicats, habitants, élus locaux et nationaux : la population de Belfort s'est mobilisée samedi pour faire reculer le «rouleau compresseur» de General Electric, qui a annoncé la suppression de 1.050 emplois en France, et clamer que ses sites industriels ont encore un avenir.
Dans la manifestation, qui rassemblait 5.000 personnes vers 14H30, selon la préfecture, ressortaient les écharpes tricolores de nombreux élus, ainsi que des gilets jaunes, au milieu de drapeaux de la CGT, du NPA ou du Parti communiste.
Les protestataires étaient nombreux à être venus en famille, tandis que certains commerces avaient baissé leurs rideaux par solidarité. Une immense banderole «Soutien aux salariés de General Electric» s'étalait aussi aux pieds du lion en grès rose de Belfort, sculpté par Bartholdi, aussi indissociable de la cité franc-comtoise que son industrie.
«Belfort debout, soulève-toi», a scandé la foule, à laquelle le délégué CFE-CGC Philippe Petitcolin a lancé : «L'important, c'est de mettre fin au massacre de GE !».
Un peu plus tôt, le syndicaliste avait appelé Emmanuel Macron à «faire reculer le rouleau compresseur mis en marche par General Electric», lors d'une conférence de presse.
Là, l'intersyndicale côtoyait élus de droite et de gauche, du maire LR de Belfort Damien Meslot au chef de file de LFI Jean-Luc Mélenchon, en passant par le sénateur socialiste Rachid Temal.
D'abord sonnés par l'annonce fin mai, par GE, de la suppression de 1.050 emplois en France, les salariés se sont vite mobilisés pour dire leur refus d'un plan social qui signerait, selon eux, l'arrêt de mort de l'entité belfortaine du groupe, qui produit des turbines à gaz, alors que le marché peut repartir.
Belfort doit en payer le prix fort : sur les 1.050 emplois supprimés, près de 1.000 concernent la ville, dont près de 800 dans l'entité de turbines à gaz, les autres dans des «fonctions support». Au total, GE emploie 4.300 salariés à Belfort.
«Ils passent en force !»
«C'est aberrant comment une boîte qui fait des bénéfices peut supprimer tellement d'emplois !», s'insurgeait Christophe, un salarié de GE venu manifester avec sa femme et son fils et selon qui il faut «montrer qu'on est unis parce qu'ils passent en force!».
Par deux fois cette semaine, les salariés ont empêché la tenue de la première réunion d'information-consultation qui devait lancer le plan social. Début juin, ils avaient aussi bloqué pendant quelques heures une turbine d'une centaine de tonnes à la sortie de l'usine.
En dépit de ces actions, «la procédure information-consultation", qui lance le plan social, a bel et bien «officiellement commencé», a indiqué vendredi à l'AFP une source proche du dossier.
«Tous les experts s'accordent à dire que le marché de la turbine à gaz va rebondir rapidement, pour remplacer le charbon, remplacer le nucléaire, pour accompagner la montée en puissance du renouvelable», a insisté samedi Philippe Petitcolin.
Appelant à «préserver les savoir-faire et qualifications ouvrières qui sont concentrés ici à Belfort», Jean-Luc Mélenchon a pointé un «pacte de corruption", dénoncé aussi par le député Olivier Marleix (LR), qui avait saisi en janvier la justice pour qu'elle enquête sur les circonstances de la vente du pôle énergie d'Alstom à GE.
«Tout cela s'est passé sous l'autorité, maintenant lointaine, de François Hollande, mais M. Macron avait déjà des responsabilités (…) et maintenant, la chaîne de commandement dans cette entreprise est faite de proches de M. Macron. Donc, là il y a un grave soupçon», a dit M. Mélenchon.
En 2015, le rachat du pôle Energie d'Alstom par GE s'était accompagné de la promesse de créer 1.000 emplois nets en France d'ici à la fin 2018. Une promesse non tenue, pour laquelle GE a dû payer des indemnités, avant d'annoncer finalement plus d'un millier de suppressions d'emplois.