L'université Jean-Jaurès à Toulouse occupée depuis deux mois par des étudiants opposés à la réforme gouvernementale d'accès à l'université, a été évacuée mercredi avant l'aube par quelque 200 policiers, survolés par un hélicoptère, a constaté un journaliste de l'AFP.
«Il n'y a eu aucun incident, il n'y a pas eu de blessé», ni d'interpellation, a déclaré sur place Frédéric Rose, le directeur de cabinet du préfet de Haute-Garonne. Dans un point presse de fin d'évacuation, M. Rose a précisé qu'une «enquête pour dégradations» serait diligentée.
Arguant de «troubles à l'ordre public» et de dégâts importants, le tribunal administratif de Toulouse, saisi par le syndicat UNI et quatre étudiants, avait ordonné l'évacuation le 2 mai.
Depuis le 6 mars, plusieurs dizaines d'étudiants et de militants occupaient à tour de rôle deux bâtiments de l'université Jean-Jaurès (ex Le -Mirail), dont ils avaient bloqué les accès avec un amoncèlement de chaises.
Plusieurs camions de CRS ont débarqué à 03H45 aux abords de l'université, survolée par un hélicoptère pendant l'évacuation. Quelque 180 policiers, selon M. Rose, sont intervenus sur le site universitaire et ont procédé à l'évacuation d'une soixantaine de personnes, selon un communiqué de la préfecture.
Equipés de boucliers et de casques, les CRS ont obstrué l'entrée principale du bâtiment de l'Arche, un des deux bâtiments occupés.
Escortés par les policiers, les étudiants sont sortis par groupes, frappant dans leurs mains, et scandant «libérez nos camarades» ou encore «Et l'université, elle est à qui ? elle est à nous !».
«On savait que ça allait arriver car il y avait déjà plein d'universités évacuées», a déclaré à l'AFP un des étudiants évacués. «Il y a eu des coups de matraque, des coups de pied, des gens sont tombés à terre mais malgré ça, ils ont continué à marcher, à nous évacuer, des gens ont été piétinés», a rapporté cet étudiant en histoire, qui occupait le hall de l'Accueil, l'autre bâtiment occupé.
Les étudiants sont appelés à se réunir en Assemblée générale à 12H30 à la gare Matabiau. «On va continuer la mobilisation, on a déjà prévu d'autres endroits», a ajouté le même étudiant.
La préfecture a indiqué que «les identités des personnes sur place» avaient été relevées et que les enquêteurs tenteraient «d'identifier les éventuels auteurs des dégradations».
Sur le campus, «les dégâts sont importants avec une première estimation de l'ordre de 400.000 euros», a déclaré sur place Richard Laganier, l'administrateur provisoire de l'université que le tribunal administratif avait enjoint de «faire procéder à l'évacuation de deux bâtiments occupés illégalement».
«L'évacuation va nous permettre de remettre en ordre l'établissement et d'aller je l'espère vers une reprise d'activité», a déclaré M. Laganier, nommé à la mi-mars par la ministre de l'Enseignement supérieur Frédérique Vidal en raison du blocage.
Tags et bris de verre
L'administrateur provisoire est allé faire une première inspection du bâtiment de l'Accueil, qui porte sur ses murs de très nombreux tags, renferme des tables renversées et des portes en verre brisées, a constaté un journaliste de l'AFP.
En découvrant l'état de l'amphithéâtre, où s'amoncelaient matelas, couvertures et couettes, M. Laganier a déclaré en apparté : «la situation est alarmante, on va le fermer jusqu'à nouvel ordre, ça va prendre du temps, il y a des chances qu'il soit fermé jusqu'à septembre».
Il a annoncé un dépôt de plainte pour dégradations et la fermeture administrative de l'université «pour quelque jours, de manière à pouvoir reprendre dans le calme (...) les activités à la fois pédagogiques de recherche et administratives nécessaires au bon déroulement de cette fin d'année universitaire».
Il a souhaité que les examens puissent se tenir à l'université, sans pour autant exclure une «délocalisation». Les examens débuteront le 11 juin.
Regrettant avoir dû faire appel aux forces de l'ordre, M. Laganier a précisé que la sécurité serait renforcée pour éviter une nouvelle occupation, estimant qu'une «communauté universitaire largement majoritaire» avait souhaité un «déblocage rapide».
Le site était ensuite inspecté de fond en comble pour s'assurer qu'il ne renferme pas de cocktails molotov comme sur le site universitaire de Tolbiac à Paris.