Pour la première fois depuis ses aveux, Jonathann Daval, qui a reconnu fin janvier avoir étranglé son épouse Alexia, sera entendu par le juge d'instruction en charge de l'enquête jeudi matin à Besançon.
Selon une source proche du dossier, citée par l’AFP, l’audition de Jonathann Daval aura lieu à 10h au tribunal de grande instance de Besançon. Le meurtrier présumé sera entendu par le juge d'instruction bisontin Rodolphe Uguen-Laithier. De nombreuses questions demeurent sans réponses et cette audition pourrait apporter de nouveaux éléments au dossier qui comporte encore de nombreuses zones d'ombres.
Jonathann Daval pourrait notamment être interrogé sur les circonstances du meurtre de sa femme. Le corps de cette dernière avait en effet été retrouvé par les gendarmes, le 30 octobre dernier, après deux jours de recherches, partiellement calciné et dissimulé sous des branchages dans le bois d'Esmoulins, près de Gray, en Haute-Saône. L’époux conteste toujours l'avoir incendié, et cet élément du dossier reste un mystère pour les enquêteurs.
Durant sa garde à vue, le 30 janvier, l'informaticien de 34 ans avait reconnu avoir tué sa femme lors d'une dispute conjugale, dans la nuit du 27 au 28 octobre au domicile du couple à Gray-la-Ville. Les époux en seraient venus aux mains et Jonathann Daval a avoué avoir étranglé sa femme en tentant de la «maîtriser».
Le lendemain du meurtre, Jonathann Daval avait déposé le corps de sa femme dans le bois près de leur maison, prenant soin d’envoyer, dans la matinée, des SMS à sa belle-famille en se faisant passer pour leur fille, dans l’idée de faire croire qu’Alexia avait été tuée durant son jogging dominical.
Il avait ensuite prévenu les gendarmes de la disparition inquiétante de son épouse, affirmant qu'elle n’était pas rentrée après être allée courir.
Un gendre au-dessus de tout soupçon
C’est ainsi que durant trois mois, Jonathann Daval avait endossé le rôle du mari éploré, feignant d’ignorer tout et soutenu par ses beaux-parents, qui voyaient en lui le gendre idéal au-dessus de tout soupçon. La trahison est d'autant plus forte qu'il avait participé à plusieurs hommages rendus à Alexia, dont une marche blanche, qui avait rassemblé jusqu’à 10.000 personnes dans les rues de Gray. Les habitants n'ont d'ailleurs pas caché leur surprise au moment de la révélation du drame.
Face à des preuves scientifiques indiscutables, comme le traceur sur son véhicule professionnel attestant que l'automobile avait roulé la nuit du meurtre, des traces de pneus correspondant à la voiture et un drap du couple retrouvé près du cadavre de son épouse, Jonathann Daval avait fini par craquer à la toute fin de sa garde à vue, avouant alors ce que son entourage refusait de croire.
Me Randall Schwerdorffer, l’un des deux avocats du mari, qui a par la suite reconnu «ne pas avoir respecté certains usages», avait provoqué la colère de Marlène Schiappa et des réseaux sociaux en dépeignant le portrait d’un mari «rabaissé, écrasé» par une femme «dominante». «C'est un couple dont malheureusement l'un des conjoints était violent mais ce n'est pas celui auquel on pense», avait lancé Me Randall Schwerdorffer. Selon ce dernier, le couple connaissait de «fortes tensions» en raison de leurs difficultés à avoir un enfant. «A un moment, il y a eu des mots de trop, une crise de trop, qu'il n'a pas su gérer», avait déclaré le pénaliste.
Nous ne sommes pas «au bout de nos surprises»
Pour Me Florand, l’avocat des parents d’Alexia Daval, interrogé par Ouest France, les aveux du mari «ne collent pas à la réalité» des faits. L'avocat estime que cette affaire «sort de l’ordinaire» et nous ne sommes pas, selon lui, «au bout de nos surprises».
«Jonathann a peut-être avoué ce qu’on voulait entendre de lui. Je ne doute pas qu’il soit dans le générique, mais à quelle place ? A-t-il bénéficié d’un complice ou d’un coauteur ? La qualification de meurtre sur conjoint va-t-elle se transformer en assassinat, en raison d’une préméditation ?», s’interroge le conseil.
De son côté, Stéphane Bourgoin, spécialiste français des tueurs en série, estime que Jonathann Daval est un homme cynique et manipulateur. «Il est aussi cynique dans la manière d'effectuer son meurtre. Il étrangle Alexia Daval, puis lui met un short et ses chaussures de jogging. Il prend son téléphone pour envoyer des SMS à sa soeur pour lui faire croire qu'elle passerait voir ses parents. Puis je pense qu'il est resté effondré à côté de son corps, il a même essayé de la calciner et a été pris à son propre piège», a déclaré l’expert dans une interview accordée à Télé Loisirs.