Inconnu il y a quelques mois du grand public, devenu l'un des meilleurs élèves et une pièce maîtresse du gouvernement, Jean-Michel Blanquer a passé jeudi soir son grand oral sur France 2, l'occasion d'affirmer son poids politique.
Il a déclaré espérer rester le plus longtemps possible à son poste. «Mais ça ne dépend pas que de moi, cela dépend de la confiance du Premier ministre et du président en particulier».
«Si vous me demandez jusqu'où j'irai, j'irai jusqu'au ministère de l'Éducation nationale. C'est une ambition suffisamment grande en soi, il y énormément de choses à faire, il faut du temps pour faire avancer les choses», a-t-il ajouté.
Au lendemain de l'annonce de sa réforme radicale du baccalauréat, promesse d'Emmanuel Macron, la presse, pratiquement unanime, encense le ministre de l’Éducation.
«Blanquer, chouchou de la classe», écrit le Parisien, «Blanquer s'impose comme l'atout réformateur", avance le Figaro. Pour le directeur de la rédaction de Libération, Laurent Joffrin, la réforme «obéit à une dose de bon sens». La Croix titre sur «le pari» de Jean-Michel Blanquer de «changer l'école». Seule L'Humanité accuse le ministre de «lessiver le bac».
Plus fort encore : l'intéressé a droit cette semaine a deux «Unes» d'hebdo. Pour Le Point, il est tout simplement «le vice-président». Et Valeurs actuelles, qui lui consacre sa couverture pour la deuxième fois, titre : «la nouvelle star».
Pour cet ancien recteur et numéro deux officieux du ministère sous la présidence de Nicolas Sarkozy, qui ambitionne de restaurer la «confiance» dans l'école, cette soudaine notoriété va de pair avec une forte popularité.
Et sa prestation dans L'émission politique a été jugée «convaincante» par 71% des spectateurs, selon un sondage réalisé auprès de 1.052 personnes en fin d'émission, un score record. Après le Premier ministre Édouard Philippe, il était le deuxième membre du gouvernement invité.
«Sur tous les fronts»
Jean-Michel Blanquer a confirmé son projet d'interdiction du portable à l'école et au collège pour la rentrée prochaine, qui se fera à partir d'expériences déjà mises en oeuvre dans certains établissements.
«Ça peut prendre des formes différentes, comme des casiers, ou mettre (l'objet) dans un petit sac dans un cartable», a-t-il dit. «Nous allons offrir un choix de plusieurs solutions techniques aux établissements».
Il veut également «travailler» pour améliorer le pouvoir d'achat des enseignants, «insuffisant», avec comme première mesure la tenue de la promesse de campagne d'Emmanuel Macron d'une prime de 3.000 euros par an pour les professeurs en éducation prioritaire.
Pour les autres professeurs, «il y aura d'autres mesures de ce type, ça va se faire dans le temps, à la mesure des moyens».
Selon Brice Teinturier, directeur général délégué d'Ipsos, «à force d'être sur tous les fronts et dans de nombreux médias, il émerge».
Depuis son arrivée au gouvernement, M. Blanquer a en effet multiplié les annonces: réduction des effectifs dans les CP défavorisés, retour des évaluations, détricotage des réformes du collège et des rythmes scolaires...
Avec ses prises de position en faveur de l'uniforme, du retour de la dictée, des classes bilangues, de la mise en place de chorales ou de l'interdiction du portable, il a donné des gages aux conservateurs, tout en affichant un profil moderniste en misant sur les neurosciences.
Il "est devenu in fine une des pièces maîtresses de l'échiquier gouvernemental" et séduit largement, même si "c'est clairement à droite qu'il est le plus apprécié", relève M. Teinturier.
Pour le patron des députés socialistes, Olivier Faure, le ministre de l’Éducation nationale est surtout «un très bon communicant», apprécié des Français car il les renvoie au film à grand succès populaire «Les Choristes».
Pour le sociologue François Dubet, le nouveau ministre est arrivé «dans une situation très favorable» avec une «volonté de réformes dont personne ne conteste plus la nécessité».
«Il ne se présente ni comme un idéologue, ni comme un politique, mais combine une sensibilité conservatrice qui rassure, et veut fonder ses actions sur des résultats scientifiques : cela peut désarmer des opposants éventuels», explique-t-il.