Après trois ans consécutifs de hausse, la courbe s'est enfin inversée: le nombre de morts sur les routes a légèrement reculé en 2017 en France (-1,2%), ravivant la polémique sur l'opportunité de la baisse de la vitesse sur certaines routes annoncée par le gouvernement.
Après avoir atteint un plus-bas historique en 2013 (3.427 tués), la France a ensuite connu trois années noires, une situation inédite depuis 1972. Le bilan annuel communiqué jeudi par la Sécurité routière, qui inclut pour la première fois l'Outre-mer, a marqué la fin symbolique de cette série funeste.
En 2017, 3.693 personnes ont été tuées en France, soit une baisse de 1,2% par rapport à 2016 (45 décès en moins): 3.456 sur les routes de métropole (-0,6%) et 237 en Outre-mer (-9%).
Le nombre d'accidents (61.570, +2,8%), de blessés (77.476, +2,2%) et d'hospitalisations (29.252 +1,5%) est, lui, toutefois en hausse.
Selon la Sécurité routière, en métropole notamment, «l'analyse des accidents mortels en 2017 montre que la vitesse excessive ou inadaptée reste la cause principale, suivie de la surconsommation d'alcool, qui connaît une légère hausse». Troisième facteur d'accident : le non-respect des règles de priorité, en légère baisse.
«On ne peut que se réjouir d'avoir sauvé des vies. Mais nous souhaitons que cette baisse soit plus tranchée, pour nous, c'est plutôt une stabilité baissière», tempère le délégué interministériel à la Sécurité routière, Emmanuel Barbe.
«On est très loin de l'année de référence qui reste 2013, ce n'est pas à la hauteur de ce qu'on pouvait espérer», estime de son côté la présidente de la Ligue contre la violence routière, Chantal Perrichon.
Le débat sur les 80 km/h ravivé
Ces chiffres vont raviver le débat sur l'abaissement au 1er juillet de 90 à 80 km/h de la vitesse maximale autorisée sur les 400.000 km de routes secondaires à double sens sans séparateur central, mesure aussi emblématique que polémique du plan de sécurité routière annoncée le 9 janvier par le Premier ministre Edouard Philippe.
«Cette baisse prévisible est la preuve qu'il n'y a pas besoin de réduire la vitesse», estime ainsi le délégué général de l'association 40 millions d'automobilistes, Pierre Chasseray, farouche opposant au 80 km/h : «On appelle le Premier ministre à revenir sur cette annonce inutile».
En métropole, les motocyclistes sont les usagers qui ont connu la plus forte hausse du nombre de tués, avec 669 décès (56 de plus qu'en 2016, +9%), devant les cyclistes (172 morts, +6%) et les automobilistes (1.770 décès, +1%). La mortalité des piétons est, elle, en recul (488 décès, -13%).
Didier Renou, porte-parole de la Fédération française des motards en colère, estime que le plan gouvernemental devrait prévoir des mesures spécifiques pour les deux-routes motorisés.
Il appelle à agir sur les «véritables causes» des accidents, à savoir les comportements sur la route, par «l'éducation à un vivre-ensemble et un partage de la route» et les infrastructures, plutôt que sur la vitesse.
Pour Chantal Perrichon, cette légère baisse appelle au contraire à aller plus loin. «Avec cette 'mesure de rupture' (80 km/h), nous sommes en droit d'espérer dès sa mise en place une inversion plus significative de la courbe», estime-t-elle, appelant au «courage politique» du gouvernement pour «résister aux groupes de pression».
Alors qu'associations de motards et d'automobilistes multiplient les manifestations, «ces chiffres ne remettent en rien en cause la pertinence des mesures», assure Emmanuel Barbe.
«Ce plan ambitieux devrait permettre d'avoir une vraie baisse à l'avenir», ajoute-t-il, en rappelant les autres mesures annoncées pour lutter notamment contre l'alcool (développement éthylotests anti-démarrage) ou le téléphone (possibilité de rétention du permis de conduire) au volant.