Des parcs aquatiques ont obtenu lundi l'annulation pour vice de procédure d'un arrêté ministériel interdisant la reproduction des dauphins et des orques en captivité, une décision dénoncée par des ONG qui veulent voir disparaître les spectacles de cétacés.
Le 3 mai 2017, l'ex-ministre de l'Environnement Ségolène Royal avait signé un arrêté interdisant la reproduction de ces deux espèces en France et prévoyant également l'augmentation de la taille des bassins et l'interdiction du chlore dans le traitement de l'eau, dans le but notamment de «supprimer la souffrance animale».
Mais le Conseil d'Etat a annulé le texte lundi, jugeant qu'il avait «été pris au terme d'une procédure irrégulière».
«C'est une excellente nouvelle pour nos animaux et les parcs zoologiques de France», a immédiatement réagi dans un communiqué Pascal Picot, directeur général de Marineland, qui avait saisi la justice administrative aux côtés du Parc Astérix et du parc Planète sauvage de Port-Saint-Père en Loire-Atlantique.
«Il est important que les modifications significatives de la réglementation qui s'applique aux animaux que nous hébergeons soient basées sur des faits scientifiques et soient adoptées conformément aux exigences légales», a ajouté M. Picot.
Mais plusieurs ONG de défense des animaux, qui avaient vu dans cet arrêté la fin de l'activité des delphinariums, ont réclamé de nouvelles mesures pour protéger les cétacés en captivité.
«Retour en arrière historique»
«Nous demandons au gouvernement de défendre ces êtres sensibles en prenant à nouveau cet arrêté, mais cette fois-ci dans les formes», a ainsi insisté PETA, dénonçant les «souffrances des dauphins et des orques captifs».
«Nous sommes là face à un retour en arrière historique qui va à l'encontre de l’évolution et du progrès car détenir ces animaux en captivité à des fins de spectacle reste un non-sens», a renchéri la présidente de la SPA Natacha Harry, regrettant le «manque de sérieux dans le traitement de ce dossier crucial en matière de bien-être animal».
Plusieurs ONG ayant pris part à la procédure judiciaire (C'est Assez !, Association pour la protection des animaux sauvages, Fondation Droit animal, Ethique et Sciences) ont également déploré cette annulation, «à l'heure où de plus en plus de voix s'élèvent contre les spectacles avec animaux sauvages».
Alors que le ministre de la Transition écologique Nicolas Hulot a récemment évoqué le lancement d'une réflexion sur la condition animale, elles ont demandé à le voir «pour discuter de cette décision et décider des suites à lui donner».
Le ministère a simplement «pris acte» de la décision du Conseil d'Etat et indiqué réfléchir «à l'étape suivante».
L'arrêté prévoyait initialement un «contrôle étroit de la reproduction des dauphins» en fonction de «la configuration et la taille des bassins». Mais il avait été durci au dernier moment et stipulait: «la reproduction des orques et des dauphins actuellement détenus en France est désormais interdite».
«Menace l'avenir des parcs aquatiques»
Le Conseil d'Etat a relevé que lors des premières consultations du conseil national de la protection de la nature et du conseil supérieur de la prévention des risques technologiques, «l'interdiction ne s'appliquait qu'aux orques» et qu'elle avait ensuite été élargie à tous les grands dauphins, sans nouvelle consultation.
Mais «eu égard à la portée de cette disposition qui menace l'avenir des parcs aquatiques» et aux modifications apportées, les deux conseils auraient dû être à nouveau consultés, estime-t-il.
Compte tenu de «l'ampleur des changements», une nouvelle consultation publique était également «requise», juge la plus haute juridiction administrative, annulant ainsi l'ensemble du texte.
A l'audience, le 12 janvier, le rapporteur public du Conseil d'Etat - dont les avis sont généralement suivis - avait demandé l'annulation de l'arrêté.
L'ancienne ministre Ségolène Royal a de son côté assuré lundi sur Twitter avoir «pris (ses) responsabilités» après avoir pris connaissance pendant la consultation «de la maltraitance» sur les dauphins,«drogués et affamés pour les faire agir (ce que les spectateurs ignorent)». «Le bien-être animal doit être inscrit dans notre droit pour faire évoluer les mentalités des juristes», a-t-elle ajouté.