La direction française de Lafarge pouvait-elle ignorer le pacte conclu par sa filiale syrienne avec Daesh ? L'ex-PDG Bruno Lafont et un autre dirigeant ont été mis en examen vendredi pour «financement d'une entreprise terroriste», tout comme l'ex-directeur général Eric Olsen jeudi.
M. Lafont, PDG du cimentier Lafarge de 2007 à 2015, et Christian Herrault, ex-directeur général adjoint chargé notamment de la Syrie, ont également été mis en examen pour «mise en danger de la vie d'autrui», a-t-on appris de source judiciaire. Ils ont été placés sous contrôle judiciaire et devront s'acquitter d'une caution, a ajouté cette source, sans en préciser le montant.
Les deux dirigeants avaient été placés en garde à vue mercredi dans les locaux du Service national de douane judiciaire (SNDJ) avec Eric Olsen.
Ce dernier, DRH puis directeur général adjoint du groupe à l'époque des faits, avant de devenir directeur général après la fusion du cimentier français avec le Suisse Holcim en 2015, a été mis en examen jeudi pour les mêmes chefs et également soumis à un contrôle judiciaire. Il devra s'acquitter d'une caution de 200.000 euros, a indiqué à l'AFP une source proche du dossier.
Accords avec Daesh
L'affaire est hors norme : la filiale syrienne (Lafarge Cement Syria, LCS) de la société est mise en cause pour avoir pactisé avec Daesh entre novembre 2013 et septembre 2014 afin de maintenir son usine de Jalabiya (nord du pays) dans une zone de conflit tenue notamment par l'organisation jihadiste. Elle lui a fait remettre, via un intermédiaire, plus de 500.000 dollars et lui a acheté des matières premières, dont du pétrole, en violation d'un embargo de l'Union européenne, selon un rapport rédigé à la demande de LafargeHolcim par le cabinet américain Baker McKenzie.
Les enquêteurs tentent de déterminer si la direction à Paris était au courant de tels agissements.