Baptisé «OAS», le groupe projetait des «actions violentes», mais «aux contours imprécis», contre des politiques ou des mosquées : huit suspects, dont trois mineurs, ont été mis en examen samedi à Paris dans l'enquête sur l'organisation fondée par le militant d'ultradroite Logan Alexandre Nisin.
Au terme de quatre jours de garde à vue, ces hommes âgés de 17 à 29 ans ont été présentés samedi à un juge d'instruction et mis en examen pour «association de malfaiteurs terroriste criminelle», a indiqué le parquet de Paris. Conformément à ses réquisitions, six d'entre eux ont été écroués et un septième a été incarcéré provisoirement dans l'attente d'un débat sur sa détention. Un mineur a par ailleurs été placé sous contrôle judiciaire.
Mardi, les services antiterroristes avaient mené un coup de filet quatre mois après l'interpellation de Logan Alexandre Nisin, un ancien militant de l'Action française Provence, organisation royaliste qui avait multiplié les provocations musclées autour de Marseille et d'Aix-en-Provence avant l'été.
Arrêté à Vitrolles (Bouches-du-Rhône), le jeune homme de 21 ans avait été mis en examen en juillet dans ce dossier mené par un juge antiterroriste en lien avec la Sous-direction antiterroriste (SDAT) et la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI).
Parmi les dix personnes interpellées dans le sud-est de la France et en région parisienne et placées en garde à vue, deux avaient été relâchées, dont la mère du militant.
Racket et entraînement paramilitaire
La justice soupçonne les huit suspects d'appartenir à l'organisation fondée par le jeune homme. Son nom: OAS, un sigle qui reprend celui de l'Organisation de l'armée secrète, responsable d'une campagne sanglante contre l'indépendance de l'Algérie au début des années 1960.
«Le groupe avait pour projet de commettre des actions violentes, aux contours imprécis», a souligné une source proche du dossier.
Parmi ses cibles potentielles, l'organisation envisageait de s'en prendre à des «lieux de culte», dont des mosquées, des «personnes d'origine nord-africaine ou personnes noires», des «militants anti-fascistes» ou des «hommes politiques».
Figuraient notamment le porte-parole du gouvernement Christophe Castaner et Jean-Luc Mélenchon, ex-candidat à la présidentielle de la France Insoumise. M. Castaner, ancien député-maire de Forcalquier (Alpes-de-Haute-Provence), et M. Mélenchon, député des Bouches-du-Rhône, ont tous les deux indiqué en avoir été informés par la presse.
L'enquête a montré que «l'organisation prévoyait des achats d'armes et d'effectuer des entraînements paramilitaires. Certains d'entre eux s'étaient déjà entraînés aux tirs», a relaté la source proche du dossier.
Le groupe projetait également «de racketter des chefs d'entreprises afin de financer l'organisation et notamment des achats d'armes». Dans cette logique, Logan Alexandre Nisin est suspecté d'être impliqué dans le vol d'un véhicule le 21 juin, pour lequel deux des huit suspects sont en outre poursuivis pour «vol en relation avec une entreprise terroriste».
Le jeune homme avait attiré l'attention des enquêteurs car il était l'administrateur d'une page Facebook à la gloire de l'extrémiste de droite norvégien Anders Behring Breivik, auteur d'une tuerie qui a fait 77 morts en Norvège en 2011.
«Sans nier la réalité des faits reprochés, on était plus dans la provocation, par défaut de moyens et de volonté d'aller jusqu'au bout, que dans des véritables projets d'attentat», a expliqué à l'AFP l'avocat de M. Nisin, Me Eric Bourlion, évoquant, derrière des «conversations sur internet», «la volonté d'un gamin de 21 ans de faire le buzz».
Le mouvement royaliste Action française (AF) a déploré jeudi de voir son nom associé à la «tentation terroriste d'ultradroite» de Logan Alexandre Nisin, qui y avait fait un passage entre fin 2015 et juin 2016. «Six mois où il va sans doute se radicaliser mais six mois où il n'a plus aucun lien ni avec l'Action française (...) ni avec des militants et adhérents», selon le secrétaire général d'AF François Bel-Ker, qui voit en Nisin un profil de «déséquilibré» et un «loup solitaire». D'après lui, aucune des personnes interpellées n'était connue du mouvement.