Six hommes, issus pour certains de la même mouvance islamiste radicale que Mohamed Merah, ont été condamnés vendredi à Paris à des peines allant jusqu'à 15 ans de prison pour des départs en Syrie en 2014.
Hasard du calendrier, le procès de ce dossier dit «toulousain» se tenait depuis lundi devant le tribunal correctionnel de Paris alors que se poursuit, deux étages plus haut, celui d'Abdelkader Merah, le frère du «tueur au scooter» Mohamed Merah.
Même milieu, la mouvance toulousaine, mêmes noms revenant en boucle : Artigat, Clain, Essid, Merah... Les deux procès sont largement entrés en résonance au cours de la semaine, sans pour autant faire de celui-ci, selon les termes de l'un des avocats, un «sous-procès Merah».
Les prévenus, jugés pour association de malfaiteurs terroriste, faisaient partie d'un groupe de Toulousains et d'Albigeois partis début 2014 en Syrie.
Ces «revenants» nient avoir combattu pour le compte de Daesh en Syrie. La plupart ont expliqué être rentrés car la réalité sur place ne correspondait pas à leurs aspirations.
Trois d'entre eux, Imad Djebali, Abdelouahed El-Baghdadi - l'époux de la sœur de Mohamed Merah, Souad - et un converti albigeois, Gaël Maurize, ont connu un retour mouvementé : ils s'étaient retrouvés dans la nature après leur expulsion de Turquie vers la France, sans personne pour les interpeller, à la faveur d'un retentissant «cafouillage» franco-turc. Ils s'étaient rendus dans la foulée.
Soupçonné d'être l'un des leaders de ce groupe, ce dont il se défend, Djebali, en récidive, a été condamné à 15 ans de prison.
El-Baghdadi, qui estime payer son mariage avec Souad Merah par un isolement sans cesse renouvelé en détention, a été condamné à neuf années d'emprisonnement.
Et Gaël Maurize, qui a concédé avoir monté la garde pour Daesh, a été condamné à huit ans de prison, assortis d'une période de sûreté des deux tiers comme pour ses deux comparses.
«Bon débarras»
Les trois autres prévenus avaient été interpellés plus classiquement, après leur retour.
Noureddine Othmani a été condamné à neuf années d'emprisonnement; il assure avoir fait de l'humanitaire en Turquie. Et deux jeunes hommes ont été condamnés à cinq ans dont trois avec sursis, une peine aménageable.
Selon le procureur, les prévenus ne pouvaient «bénéficier de l'excuse de naïveté» et invoquer un «séjour mystico-humanitaire», au vu des cercles dans lesquels ils gravitaient dans le Sud-Ouest.
Djebali et El-Baghdadi appartenaient au groupe de Toulouse. Ce groupe était une émanation, selon l'accusation, d'une précédente filière jihadiste dite d'Artigat (un village de l'Ariège) vers l'Irak pendant la guerre, dossier dans lequel le même Djebali a été condamné en 2009.
On retrouvait dans ce groupe de Toulouse le demi-frère par alliance de Mohamed Merah, Sabri Essid, lui aussi condamné dans le dossier Artigat. Ou encore Jean-Michel Clain, la voix, avec son frère Fabien, de la revendication des attentats parisiens du 13 novembre 2015.
C'est une autre figure du jihadisme dans le Sud-Ouest, l'Albigeois Thomas Barnouin, là encore condamné dans l'affaire Artigat, qui faisait office de trait d'union entre les deux groupes de Toulouse et d'Albi. «J'ai changé», avait lancé Imad Djebali, 30 ans, avant la clôture des débats.
Dernier à plaider vendredi, son avocat, Me Jérémie Boccara, avait souligné que tous ces hommes étaient partis «avant Charlie Hebdo». Djebali, El-Baghdadi et Maurize, qui se sont rendus, «sont dans le box car ils l'ont décidé», avait-il insisté.
Du départ jusqu'à cette reddition rocambolesque, ce dossier constitue selon lui une «faillite totale de l'antiterrorisme». Car les Toulousains sont partis en Syrie alors qu'ils étaient surveillés de près: «On les a laissés partir, une politique irresponsable du +bon débarras+».
Souad Merah se trouverait aujourd'hui en Algérie. Barnouin, Clain et Essid seraient toujours en Syrie, vivants ou morts.