L’idée commence à faire son chemin. De plus en plus de voix s’élèvent pour que l’on anonymise les auteurs d’attaques terroristes.
Et la suggestion séduit une large frange de la population française. Des politiques, aux anonymes en passant par les psychologues, beaucoup espèrent qu’une décision sera bientôt prise pour aller en ce sens. Derrière cette idée, on trouve une volonté d’éviter de braquer les projecteurs sur un individu qui n’attend que ça. De nombreux observateurs soulignent ainsi que le fait de dévoiler le nom et le passé des terroristes permet à ces derniers de passer à la postérité. Ce qui peut inciter d’autres individus à suivre leur exemple.
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Invité sur France Culture, le psychanalyste Fethi Benslama abonde. «Eux (les terroristes ndlr) ils vont avoir une gloire aux yeux de leurs commanditaires, de leurs amis […] ça incite d’autres à y recourir», déclare-t-il. Il s’agit même d’une stratégie de Daesh parfaitement orchestrée en ce sens «Ils laissent leurs cartes d’identités, ils veulent très vite être connus», ajoute-t-il.
Les politiques y songent
Chez les politiques également, à droite comme à gauche, cette mesure ne laisse pas indifférent. Le candidat à la primaire républicaine Geoffroy Didier (LR) se révèle ainsi convaincu qu’«anonymiser les terroristes les empêcherait d’accéder à une gloire post-mortem susceptible de susciter des vocations.»
Le député PS Sébastien Petransanta, rapporteur de la commission d’enquête sur les attentats du 13 novembre va dans son sens. «Certains terroristes sont dans une course à la célébrité, avec pour objectif de mourir en héros», affirme-t-il, ajoutant par ailleurs que lors des attentats du Bataclan, les premières questions des terroristes portaient sur la présence ou non des chaînes de télévision.
«Médiatisation excessive»
Invité sur le plateau de TF1 après l’attentat de Saint-Etienne-du-Rouvray, l'archevêque de Paris Monseigneur Vingt-trois plaide lui aussi pour l’anonymat des auteurs d’attaques terroristes «Je pense qu’il faut que nous interrogions si, par exemple, la médiatisation, excessive, qui est faite autour de ça n’est pas un facteur aggravant parce c’est 'Enfin on peut parler de moi, je suis quelqu’un'.»
Bernard-Henri Lévy, avance lui l’idée d’un «grand accord entre les médias» pour ne plus donner ni les noms ni les itinéraires des «assassins jihadistes».
Urgence d'un «grand accord» entre les médias: ne plus donner ni le nom, ni la photo, ni l'itinéraire et la vie des assassins djihadistes.
— Bernard-Henri Lévy (@BHL) 26 juillet 2016
Une pétition lancée à ce sujet
Cette volonté exprimée par toutes ces personnalités trouve un écho favorable auprès du grand public. Une pétition a ainsi été lancée il y a une semaine par un internaute pour demander aux médias nationaux de cesser de relayer les identités des auteurs. A ce jour, elle a récolté plus de 70.000 signatures.
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Juliette Méadel, secrétaire d'Etat à l'Aide aux victimes, a d'ores et déjà indiqué qu'elle étudiait la question. Des propositions seront faites en septembre afin de «faire en sorte que l'ensemble des médias se mettent d'accord autour d'une éthique. Pour prendre des précaution à la fois dans le signalement des victimes mais aussi dans la manière dont on traite les auteurs.»
Des médias réagissent
Le Monde et BFM ont fait savoir mercredi qu'ils arrêteraient dorénavant de dévoiler le visage des auteurs d'attentats. Europe 1, qui s'est joint à leur initiative, ne diffusera plus leur nom non plus.
@Europe1 décide de ne plus citer sur son antenne le nom des auteurs de tueries. Leurs photos n'apparaîtront plus sur europe1.fr
— Henry de Laguérie (@henrydelaguerie) 27 juillet 2016