Un an après avoir été otage des frères Kouachi dans son imprimerie de Dammartin-en-Goële, Michel Catalano fait face à une double peine: le traumatisme de ces heures d'angoisse et la perte de son outil de travail, qu'il cherche aujourd'hui à reconstruire. Pour "redémarrer".
"Il ne se passe pas un jour sans que j'en parle" : deux jours après avoir commis le massacre de Charlie Hebdo, Chérif et Saïd Kouachi trouvent refuge dans son entreprise en lointaine banlieue parisienne. S'ensuivent un face-à-face de deux heures avec les tueurs, d'où il a cru qu'il "ne sortirait pas vivant". Libéré, il vivra - jusqu'à l'assaut du GIGN - dans la terreur de voir Lilian, son employé caché sous un lavabo tout au long de la journée, découvert par les Kouachi.
Depuis, "pour me reconstruire, je me suis fixé un objectif, celui de reconstruire mon bâtiment", ravagé par l'assaut des gendarmes, témoigne l'imprimeur. Il a repris son activité en mars dans un entrepôt provisoire. La nouvelle imprimerie sera construite à la place de l'ancienne, seule la configuration des lieux changera. "J'ai besoin d'être dans un décor nouveau, pour aller de l'avant", explique Michel Catalano. Tous ses employés reviendront à terme travailler ici, hormis Lilian qui ne le souhaite pas. "C'est son choix, et je le respecte. Nous sommes toutefois restés en contact", indique-t-il.
"Le plus important, c'est d'être en vie"
Le début des travaux est prévu pour le début de l'année, et Michel Catalano espère pouvoir inaugurer son nouveau bâtiment en septembre. Une longue attente, d'autant plus "qu'il a fallu négocier âprement avec les assurances, alors que je n'allais vraiment pas bien", se désole-t-il. C'est seulement il y a un mois qu'il a touché l'argent des assurances. L'Etat, lui, s'est engagé à verser plus tard de quoi financer les travaux, une fois le budget définitivement fixé.
C'est grâce à une collecte de plus de 100 000 euros sur Internet qu'il avait pu reprendre son activité provisoire. La mairie, elle aussi, avait reçu pour l'imprimeur des centaines d'enveloppes. "Je pensais tout arrêter mais cet élan de solidarité m'a donné envie de redémarrer", témoigne l'entrepreneur. Sa famille également lui a donné la force de s'en sortir, confie l'imprimeur, qui travaille avec sa femme et son fils. "Le chant des oiseaux, l'odeur du café... ce sont de petites choses toutes bêtes qui me font prendre conscience que finalement, le plus important, c'est d'être en vie."
Si la reprise de son activité lui permet de se changer les idées, malgré des "flashes" et des "nuits agitées", les attentats du 13 novembre ont "ravivé une plaie qui commençait à peine à cicatriser". "C'est pour ça qu'il est important de témoigner", insiste-t-il. "Je voudrais dire aux victimes de novembre que bien sûr, c'est long, mais on peut et on doit arriver à aller de l'avant si on est bien entouré."