Entre 13.000 et 30.000 partisans du rattachement de la Loire-Atlantique à la Bretagne ont manifesté pour la "réunification" samedi à Nantes, la mobilisation la plus importante depuis le lancement du débat sur la réforme territoriale par le gouvernement, qui doit reprendre dans quelques semaines.
Avec en tête plusieurs centaines de joueurs de biniou, derrière une banderole proclamant : "Nous sommes une nation", le défilé a pris fin vers 17h00 après une heure trente de manifestation bon enfant.
"Rendre Nantes à la Bretagne c'est pour moi une évidence, tant du point de vue historique qu'économique et culturel", explique, casquette de marin et pipe à la bouche, Serge Plenier, 57 ans, professeur de breton à Paris, "de père nantais".
"On se sent moins bretons par rapport à la Bretagne, on voudrait récupérer cette identité", espère pour sa part Loreleï Carahe, 21 ans, une habitante de Nantes.
Peu avant le départ du cortège, le président de Bretagne Réunie, Jean-François Le Bihan, s'est félicité d'une "mobilisation sans précédent", revendiquant "plus de 30.000 personnes sur le site", acclamé par la foule dans une marée de "gwenn ha du", les drapeaux bretons noirs et blancs.
Les forces de l'ordre ont évalué à 13.000 le nombre de manifestants en milieu d'après-midi.
"Democracy : UK 1 France 0" proclame une des nombreuses pancartes brandies par les manifestants, en référence au référendum organisé en Ecosse sur la question de l'indépendance,. "Fusion = disparition", "Réunification il y a urgence", "On est Bretons, pas ouest-ins!", "Non au grand ouest, oui à la réunification", indiquent d'autres affichettes.
Derrière les binious, les manifestants scandent "Naoned e Breizh !", "Nantes en Bretagne" en breton.
Le chanteur Alan Stivell est là "pour défendre la Bretagne qui va disparaître" et appelle de ses voeux le "nouveau tigre celtique en Europe que serait la Bretagne" à cinq départements si la Loire-Atlantique quittait les Pays-de-la-Loire pour la rejoindre.
"Les gens sont de plus en plus mobilisés et la Bretagne sera réunifiée", affirme Christian Troadec, maire DVG de Carhaix et chef de file des bonnets rouges.
De nombreux militants et panneaux brandis par les manifestants font référence au régime de Vichy qui prit en 1941 un décret séparant la Loire-Atlantique de la Bretagne, une disposition réintroduite en 1960, lors de la création des Pays de la Loire, avec la Loire-Atlantique d'un côté, et la Bretagne à quatre départements de l'autre.
'"Elle sent le pâté, la Bretagne?"'
"Fondre la Bretagne dans les Pays de la Loire", un des projets évoqués dans la réforme territoriale, "diluerait l'ensemble. Le numérique abolit les frontières mais (...) une vraie identité forte est super utile au moment où tout se mondialise", explique Christian Guillemot, cofondateur du groupe numérique Ubisoft, venu lui aussi manifester.
Le retour de Nantes et de la Loire-Atlantique dans la région Bretagne, "c'est la pente naturelle de l'histoire", estime l'écrivain breton Yann Queffélec. "Au moment où le Premier ministre prétend renforcer la Nation, les régions... Alors quoi, elle sent le pâté, la Bretagne ?", s'énerve-t-il.
Un concert gratuit était prévu dans la soirée après la dispersion de la manifestation.
Bretagne réunie a indiqué qu'elle allait inviter les gens à mettre des drapeaux bretons "gwenn ha du" aux fenêtres à partir du 1er octobre jusqu'à la fin du débat parlementaire sur la réforme territoriale et demander aux élus d'en faire autant sur les monuments publics.
A l'autre bout de la France samedi, les présidents du conseil régional de Lorraine et des quatre départements de la région ont demandé à leurs homologues alsaciens de ne pas renoncer à la création d'une grande région Alsace-Lorraine.
Ces prises de position interviennent quelques jours après le référendum en Ecosse et le jour même où le président de la Catalogne, Artur Mas, a convoqué un référendum le 9 novembre sur l'indépendance de cette riche région du nord de l'Espagne.