Goodyear et la CGT de l'usine d'Amiens-Nord ont mis fin mercredi à un conflit qui durait depuis bientôt sept ans en signant un accord qui prévoit un triplement des indemnités de licenciement et doit permettre la fin de l'occupation du site par les salariés.
Cet accord ouvre la voie à la fermeture de l'usine annoncée le 31 janvier 2013, mais le syndicat a promis "une nouvelle bataille", cette fois-ci devant les prud'hommes, "pour montrer à tous que les licenciements (des 1.173 salariés) décidés par Goodyear n'ont aucune justification économique".
"Ce combat contre la multinationale qui fait des milliards de profits pendant qu’elle licencie permettra aussi aux salariés de dénoncer la délocalisation clandestine de leur activité et leurs conditions de travail inacceptables", a déclaré la CGT dans un communiqué.
Le syndicat, ultra-majoritaire à Amiens-Nord, a ajouté que les indemnités sont "trois fois plus importantes pour tous les salariés" que ce qui était prévu lors d'un plan de départs volontaires qui avait été proposé en 2012 puis abandonné, sans donner cependant de chiffres.
La direction de Goodyear Dunlop Tires France (GDTF) a elle évoqué "un accord favorable à l'ensemble des salariés".
Signé en préfecture mercredi en début d'après-midi, il prévoit selon elle "des améliorations significatives des indemnités qui seront perçues par les salariés dans le cadre de la fermeture de l’usine d’Amiens-Nord", ainsi que "des aménagements en matière de congés de reclassement et de mutuelle".
Fin de l'occupation
L’accord, signé en présence du directeur général de GDTF, Henry Dumortier, "implique enfin que la CGT d’Amiens-Nord mette immédiatement un terme à l’occupation de l’usine et se désiste sans délai dans la totalité des instances judiciaires tant civiles que commerciales qui l’opposent encore à Goodyear", a expliqué la direction.
En échange, GDTF s'engage "à renoncer aux poursuites", lancées après la séquestration début janvier pendant 30 heures de deux cadres de l'usine et l'occupation de l'usine par les salariés pour obtenir de meilleures primes de licenciements, avait indiqué une source proche du dossier.
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La CGT avait décidé de retenir ces deux cadres après l'échec des multiples procédures judiciaires pour invalider la fermeture de l'usine.
Pour le directeur général de GDTF, la médiation de Jean-François Cordet, préfet de la région Picardie désigné par le gouvernement, "aura été décisive dans la recherche d’une solution apaisée".
Et bientôt, Titan ?
L'ensemble des 1.173 salariés est concerné par l'accord, y compris ceux qui pourraient être repris par le groupe américain Titan, à qui Goodyear doit céder la production de pneus agricoles, a précisé le syndicat.
Le 1er novembre, Maurice Taylor, PDG de Titan International, s'était dit prêt à reprendre l'usine d'Amiens-Nord "avec zéro employé", pour redémarrer sur de nouvelles bases.
"Aucun de nous ne sera à la merci d'un licenciement sans indemnité par Titan", s'est réjouie la CGT.
"Cet accord ouvre maintenant la voie à la possibilité de l'arrivée de Titan et de M. Maurice Taylor (PDG de Titan International, ndlr) qui avait demandé que le conflit entre la CGT et Goodyear soit définitivement soldé", a déclaré le ministre du Redressement productif Arnaud Montebourg à la presse dans les couloirs de l'Assemblée nationale.
Dans un communiqué diffusé simultanément, le ministre a souligné que l'offre de reprise de l'activité agricole de Titan "assure le maintien de 333 emplois durant 4 ans et un niveau d'investissement important sur le site".
Le ton combatif du communiqué de la CGT contrastait avec l'abattement manifeste des quelques délégués croisés sur le parking de l'usine.
"Vous venez filmer la misère ?", a demandé pour sa part Mickaël Mallet, délégué syndical CGT, aux quelques journalistes présents, derrière les grilles du site, avant de repartir tête baissée, sous la pluie.
L'usine d'Amiens-Nord semblait en sursis depuis la présentation en 2007 d'un projet de création d'un complexe industriel unique voué à la production de pneus à Amiens-Nord et Amiens-Sud, jusqu'à l'annonce par la direction en janvier 2013 de la fermeture définitive.