L'enquête sur les tirs à Libération et à la Défense, dont est soupçonné Abdelhakim Dekhar, a rebondi avec la mise en examen vendredi de l'homme qui l'hébergeait à Courbevoie (Hauts-de-Seine) avant les faits et avait aidé la police à le retrouver.
Agé de 32 ans, il a été mis en examen vendredi soir par les juges d'instruction pour recel de malfaiteur et "dissimulation ou destruction de preuves", a annoncé samedi une source judiciaire.
Le parquet de Paris avait requis son placement en détention provisoire. Il a été laissé libre sous contrôle judiciaire.
Sa mise en examen fait suite à une nouvelle audition jeudi à la Brigade criminelle, au cours de laquelle l'homme a "évolué par rapport à ses déclarations initiales", selon la source judiciaire.
D'après Europe 1, qui a révélé l'information samedi, les enquêteurs pensent qu'il pourrait notamment avoir aidé Abdelhakim Dekhar à se débarrasser de son arme. L'information n'est pas confirmée de source judiciaire.
C'est avec cette arme, un fusil à pompe, qu'Abdelhakim Dekhar est soupçonné d'avoir fait irruption le 15 novembre au siège de BFM-TV, puis d'avoir grièvement blessé un assistant photographe dans les locaux de Libération trois jours plus tard, avant les coups de feu à La Défense.
Dekhar est ensuite soupçonné d'avoir brièvement pris en otage un automobiliste jusqu'à la Place de l'Etoile, à Paris.
"Tournant décisif"
Déjà condamné en 1998 pour l'équipée sanglante de Florence Rey et d'Audry Maupin à Paris, Abdelhakim Dekhar, 48 ans, a été mis en examen et écroué dans la nuit du 22 au 23 novembre pour tentatives d'assassinats à BFM TV, Libération et à La Défense, et pour enlèvement et séquestration.
Après une traque policière et la diffusion de portraits robots, il avait été arrêté au soir du 20 novembre. Les policiers l'avaient retrouvé dans un véhicule garé dans un parking de Bois-Colombes. Or, c'est justement grâce aux indications fournies par celui qui l'hébergeait, à Courbevoie, que le suspect numéro 1, ensuite confondu par son ADN, avait été localisé.
Au lendemain de l'arrestation, lors d'une conférence de presse, le procureur de Paris François Molins avait qualifié ce témoignage de "tournant décisif".
Selon ses propres déclarations, au départ de l'enquête, l'homme qui avait hébergé Abdelhakim Dekhar depuis son retour en France, en juillet, avait croisé sa route une première fois 13 ans plus tôt en Grande-Bretagne.
Abdelhakim Dekhar s'y était rendu après avoir purgé sa peine dans l'affaire Rey-Maupin. Il s'y était marié et avait de la famille dans ce pays. Depuis son arrestation, les enquêteurs cherchent à déterminer le parcours récent du suspect et les motivations de ses actes.
M. Dekhar, lié à la mouvance d'extrême gauche dans les années 90, avait notamment laissé des écrits confus évoquant un "complot fasciste", fustigeant la "gestion des banlieues", le "capitalisme", mais aussi le rôle des médias dans la "manipulation des masses", selon le procureur de Paris. Lors de sa garde à vue, il a gardé le silence, puis a entrepris une grève de la faim après son incarcération.
Lorsqu'il avait été arrêté, Abdelhakim Dekhar était dans un état "semi-conscient", après avoir absorbé des médicaments laissant penser à une tentative de suicide.