La mobilisation des agriculteurs d'Ile-de-France, entachée par un accident mortel, est parvenue à bloquer plusieurs axes routiers conduisant à Paris jeudi matin, sans ébranler la position du gouvernement qui refuse de renoncer à la redistribution des aides européennes aux céréaliers.
Le ministre de l'Agriculture a cependant annoncé l'ouverture de concertations "à haut niveau" avec ces derniers.
La Fédération des syndicats d'exploitants agricoles d'Ile-de-France (FDSEA) et la section régionale des Jeunes Agriculteurs (JA) avaient appelé leurs adhérents à se rassembler dès 05H00 sur les principaux axes au sud et à l'ouest de Paris: arrêtés à une quarantaine de kilomètres de la capitale, ils ont commencé à lever leurs blocages en fin de matinée.
Deux accidents
Peu après le lever du jour, deux accidents se sont produits en marge des barrages de tracteurs et de camions: le premier, mortel, est survenu vers 06H30 dans le Val-d’Oise, sur la Francilienne (N104) quand une voiture est entrée en collision avec un poids-lourd, tuant son conducteur - un pompier qui se rendait à son travail.
Un second accident a ensuite impliqué un car de CRS faisant six blessés légers parmi ces derniers sur l'autoroute A6 dans l'Essonne.
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"Par compassion", l'organisateur des manifestations, Damien Greffin, président de la FDSEA, a rapidement fait lever le barrage du Val-d'Oise tout en soulignant que "la responsabilité agricole n'était pas engagée" dans ce drame: "Au niveau du gouvernement, on n'est pas à une pirouette près pour démonter nos actions et les décrédibiliser", a-t-il accusé. Le ministre des Transports Frédéric Cuvillier a en premier annoncé sur Twitter la survenue des deux accidents et d'un décès, demandant en conséquence "la levée des barrages".
"On n'est pas des terroristes", avait insisté M. Greffin avant le rassemblement, en appelant à éviter les débordements.
"Ouvert au dialogue"
"Rééquilibrage" entre céréaliers et éleveurs
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Son organisation et les JA régionaux ont réclamé la démission du ministre de l'Agriculture Stéphane Le Foll en dénonçant une "surfiscalisation" et la redistribution des aides européennes entre céréaliers et éleveurs (au profit de ces derniers) à la faveur de la nouvelle Politique agricole commune (PAC). "Qu'on arrête de nous inventer une nouvelle taxe par jour!", disait M. Greffin à l'AFP. Lui-même, qui exploite seul 150 hectares de céréales et betteraves dans l'Essonne, fait valoir une perte possible de revenus "de 30 à 40%" pour les céréaliers.
"On a toujours été ouverts au dialogue", a répondu jeudi M. Le Foll en appelant "tout le monde à ses responsabilités". Mais "pas question" de revenir sur les dispositions de la PAC : "J'ai fait le choix d'un rééquilibrage des aides vers l'élevage, il n'est pas question de revenir dessus, c'est très clair", a-t-il déclaré à l'AFP.
Le ministre, qui avait prévenu n'avoir "pas pour habitude de céder aux ultimatums", a tout de même annoncé la "mise en place d'un groupe de travail à haut niveau sur la double performance économique et environnementale" avec les représentants des céréaliers.
Il a également confirmé l'ouverture "dès lundi" de discussions sur l'écotaxe, entre lui-même et le ministre des Transports d'une part, Coop de France (3.000 entreprises coopératives) et la FNSEA, le principal syndicat agricole, d'autre part. Par ailleurs, le Premier ministre recevra mardi le président de la FNSEA Xavier Beulin dans le cadre du dialogue avec les partenaires sociaux pour une remise à plat de la fiscalité, a-t-il dit.
"On est en train de mesurer l'exaspération et l'attente de l'agriculture française", a poursuivi son secrétaire général Dominique Barrau, en appelant le réseau de la FNSEA à bien "cibler" ses revendications pour les prochaines semaines, sur l'excès de taxes et de règlements, sans toucher à la PAC pour laquelle "les décisions sont prises".
En revanche, "chaque fois qu'on nous présente un nouveau projet il y a une taxe en plus", a-t-il insisté en citant l'imposition de "50 centimes d'euro par mètre linéaire de cours d'eau" pour financer la future agence de la Biodiversité.
Avant les accidents, Frédéric Cuvillier avait jugé cette mobilisation "pas compréhensible" sur RMC: "Ca n'est pas en bloquant et en lançant des ultimatums qu'on règle les choses (...). Je suis au regret de dire que ce qui est mis en avant lors de ce mouvement nécessite quelques éclaircissements".
Mais avant même que les derniers tracteurs eurent fini de se replier, M. Greffin a appelé à une nouvelle mobilisation le 29 novembre en Ile-de-France. Selon M. Barrau, "cinq à six" appels similaires sont également prévus en région dans les deux prochaines semaines.