Le Premier ministre Jean-Marc Ayrault, venu mardi à Marseille avec cinq de ses ministres, a assuré que le gouvernement était "engagé avec détermination pour faire reculer la violence" dans la ville, au lendemain d'un nouveau règlement de comptes qui, sur fond de campagne municipale, attise les oppositions politiques, y compris au sein du PS.
Manuel Valls, qui s'illustre sur tous les fronts depuis le début de l'été, a été le premier à annoncer son déplacement dans la ville. Ce n'est que plus tard dans la matinée que Jean-Marc Ayrault a à son tour fait savoir qu'il s'y rendrait, manière semble-t-il de reprendre en main le dossier.
Il est accompagné de plusieurs autres ministres, au premier rang desquels la garde des Sceaux Christiane Taubira, ainsi que Marisol Touraine (Affaires sociales), Cécile Duflot (Logement), et la Marseillaise Marie-Arlette Carlotti (Handicap et exclusion).
"Ce que je voudrais rappeler, c'est que le gouvernement est engagé avec détermination pour faire reculer la violence, la délinquance et le crime à Marseille et dans la région", a déclaré M. Ayrault devant la presse, à l'issue d'une rencontre avec le personnel de l'hôpital de la Conception où un infirmier a été blessé d'un coup de couteau dimanche par l'un des agresseurs présumés d'un jeune homme tué en plein centre.
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"Ce que nous avons entrepris depuis le mois de septembre dernier (date du conseil interministériel consacré à Marseille, ndlr) va dans la bonne direction. Il faut encore amplifier le mouvement, parce que l'objectif c'est d'assurer la sécurité de tous les Marseillais, assurer aussi le retour de la confiance, de la perspective d'avenir pour cette grande métropole de Marseille", a assuré Jean-Marc Ayrault.
Le Premier ministre doit ensuite tenir plusieurs réunions en préfecture.
Mardi matin sur BFM, Manuel Valls a promis "des moyens supplémentaires à la police judiciaire", pour "aller au coeur de ces trafics" de drogue qui gangrènent la ville.
Les réactions politiques locales n'ont pas traîné, chacun avançant des arguments rodés depuis longtemps, et encore fraîchement évoqués après le meurtre d'un étudiant de 22 ans égorgé en plein centre de Marseille le 9 août, à deux pas du commissariat central, et celui dimanche d'un adolescent de 18 ans tué à coups de couteau près du Vieux-Port et dont l'un des agresseurs présumés a ensuite blessé légèrement un infirmier des urgences. Ce qui porte à 13 le nombre de meurtres dans des règlements de comptes depuis le début de l'année.
"Mesures concrètes"
La réaction la plus virulente est venue de la maire du secteur de l'Estaque, où s'est déroulé le règlement de comptes lundi soir. La sénatrice PS Samia Ghali a vivement réclamé des "mesures concrètes" et mis en cause l'efficacité du comité interministériel du 6 septembre 2012. "Je suis incapable de dire ce qu'il est sorti de ce comité interministériel. Il n'en est rien sorti!", a-t-elle lancé sur RFI.
Ce comité avait cependant acté l'envoi de policiers supplémentaires, la création d'une métropole pour mutualiser les moyens, validée depuis par l'Assemblée nationale, et un accueil plus précoce à l'école dans les zones prioritaires.
M. Valls a implicitement répondu à Mme Ghali, qui avait proposé à l'été 2012 l'intervention de l'armée dans les cités: "Il y a une surenchère notamment de la part des élus", a-t-il mis en garde, en allusion à la primaire socialiste pour les municipales cet automne, à laquelle Mme Ghali sera candidate avec cinq autres élus.
Marie-Arlette Carlotti, également candidate, a riposté aussitôt, devant la presse: "Je ne peux accepter qu'on dise qu'un an après, rien ne se fait".
Un autre candidat PS s'était déjà fait rappeler à l'ordre récemment par M. Valls. Eugène Caselli, président de la communauté urbaine, avait ainsi demandé le classement de la totalité de la ville en zone de sécurité prioritaire (ZSP) à la suite d'un autre meurtre le 22 août. Réponse de M. Valls: "Cela ne serait pas efficace et n'aurait aucun sens".
Le sénateur-maire Jean-Claude Gaudin (UMP), lui, s'en est pris au gouvernement. Alors que M. Valls a fermement critiqué son bilan en matière de sécurité, il s'est dit "stupéfait". "L'agressivité du ministre de l'Intérieur et ses nombreuses visites ne peuvent pas faire oublier la faiblesse des effectifs de la police nationale, surtout quand on les compare à ceux d'autres grandes villes de France". M. Valls "devrait savoir que c'est à l'Etat d'assurer la sécurité des personnes et des biens, et pas à la police municipale dédiée à d'autres missions", a-t-il affirmé dans un communiqué.