Le parquet de Paris a requis le renvoi en correctionnelle de l'ex-patron du renseignement intérieur, Bernard Squarcini, dans l'affaire des "fadettes", relative à l'espionnage téléphonique d'un journaliste en marge du dossier Bettencourt, a annoncé mardi à l'AFP une source proche du dossier.
Le ministère public a estimé que l'ancien directeur central du renseignement intérieur (DCRI), un proche de Nicolas Sarkozy, devait être jugé pour "collecte de données à caractère personnel par un moyen frauduleux, déloyal ou illicite", délit passible de cinq ans de prison et 300.000 euros d'amende.
M. Squarcini est poursuivi pour avoir à l'été 2010 fait requérir et analyser les factures téléphoniques détaillées ("fadettes") du reporter du Monde Gérard Davet et d'un conseiller du ministère de la Justice, David Sénat, dans le but d'identifier la source du quotidien du soir.
Le Monde venait de révéler les déclarations à la police du gestionnaire de la fortune de Liliane Bettencourt, Patrice de Maistre, qui mettaient en difficulté Eric Woerth, alors ministre de Nicolas Sarkozy.
Dans cette affaire, qui pose la question de la protection des sources de la presse, M. Squarcini avait reconnu devant les juges d'instruction avoir cherché la source du reporter en faisant analyser ses fadettes. Mais il s'en est justifié en affirmant avoir agi dans un cadre totalement légal et prévu par la loi de 1991 sur le secret des correspondances, en particulier de son article 20 qui autorise leur contrôle aux "fins de défense des intérêts nationaux".
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Une analyse contestée par le parquet de Paris, qui a notamment considéré que d'éventuelles fuites provenant d'un ministère sur une affaire de droit commun ne pouvaient constituer une véritable atteinte à la sécurité nationale.
Il revient au final aux juges d'instruction en charge du dossier de suivre ou non les réquisitions du parquet.
Il est fort probable que la magistrate le fasse, puisqu'elle avait mis en examen en octobre 2011 l'ex-patron du renseignement intérieur, non seulement pour "collecte illicite de données à caractère personnel", mais aussi pour "atteinte au secret des correspondances par personne dépositaire de l'autorité publique dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions" et "recel de violation du secret professionnel".
Ces deux dernières qualifications avaient été annulées en décembre par la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris.