"Ne soyez pas à fleur de peau": le temps d'un café, le fondateur de PIP Jean-Claude Mas a pu dialoguer, jeudi, avec une victime du scandale des prothèses frauduleuses jugé à Marseille, venue le voir à une suspension d'audience, devant quelques journalistes.
Le prévenu est assis, seul, à une petite table au sortir de la salle d'audience, durant la pause déjeuner, quand trois membres d'une association de porteuses d'implants prennent place à ses côtés.
Scène surprenante, où l'une d'elles raconte qu'à la suite d'une ablation des deux seins en 1994, pour cause de maladie, sa poitrine fut reconstruite avec des implants PIP remplis de silicone, juste avant son interdiction en France - il fut réintroduit en 2001.
M. Mas leur précise qu'il s'agissait déjà du gel de fabrication maison que la justice lui reproche d'avoir utilisé à la place du gel de marque Nusil, homologué contrairement au sien, de 2001 à 2010.
Cathy, la patiente, lui raconte qu'un de ses implants s'est rompu, nécessitant son explantation et entraînant des complications. Depuis, on ne parvient plus à lui implanter une prothèse, même d'une autre marque.
Elle lui demande si le gel PIP est corrosif. "Non, si vous en aviez un d'une autre marque, ce serait pareil", lui répond le prévenu. Elle se lève alors nerveusement, alors que l'échange jusque-là était calme. "Ne soyez pas à fleur de peau", lui glisse M. Mas.
La veille, une victime espagnole était déjà venue le voir. "Elle n'était pas agressive, alors que celle-ci était anxieuse", dit-il.
"Avant 2010, personne ne parlait de ces problèmes, alors qu'il y en a toujours eu. Ces femmes pensent qu'elles ont une bombe dans leur corps, et ce sera le cas tant qu'on ne leur dira pas que ce n'est pas dangereux. Mais ça vient petit à petit. On leur doit la vérité", poursuit le principal prévenu du procès.
"C'est moi qui l'ai abordé parce que je voulais savoir. J'ai essayé de lui faire comprendre mon parcours, de lui dire que son gel était nocif, mais je n'ai pas réussi. Pour lui, il y a tromperie, mais son gel est bon. Pour moi, c'est un guignol, il ment", a expliqué Cathy après la scène.
"On a été agréablement surprises car il s'est montré ouvert au dialogue et on a pu échanger calmement. Il n'en démord pas sur la non toxicité de son gel, mais il nous a écoutées", a estimé Alexandra Blachère, présidente de l'association de porteuses d'implants.