La pilule provoque 20 décès par an en France dont 14 pour les seuls contraceptifs de 3e et 4e génération, critiqués par les autorités sanitaires, ainsi que plus de 2.500 "accidents" vasculaires, a évalué mardi l'Agence du médicament (ANSM).
Ces décès découlent de la survenue d'embolies pulmonaires, la conséquence la plus grave de la formation d'un caillot dans les veines (thrombose), explique l'ANSM.
Elle publie cette "estimation" dans le cadre du point régulier réalisé sur l'utilisation des pilules depuis l'alerte lancée en janvier sur les pilules de 3e et 4e génération (commercialisées par les principaux laboratoires Bayer, Pfizer, Sanofi, Novartis ou même Servier, le fabricant du Mediator) accusées d'entraîner un risque accru de thromboses veineuses pour celles qui les prennent.
Cette étude est la première à tenter d'évaluer les risques liés à la prise des contraceptifs oraux combinés (COC) chez les 4,27 millions de femmes utilisatrices en France (chiffres 2011).
On savait jusqu'à présent d'après plusieurs études que les pilules de 1e et 2e génération augmentaient par deux le risque d'accidents thromboembolique veineux, celles de 3e et 4e augmentaient par quatre ce risque. A titre de comparaison, le risque est multiplié par six chez une femme enceinte.
Toujours à titre de comparaison, une femme de plus de 35 ans qui fume (donc avec risques accrus) a autant de chance de mourir d'un accident vasculaire lié à la pilule que de mourir dans un accident de la route (estimation de la gynécologue Geneviève Plu-Bureau découlant d'une étude américaine).
D'après l'évaluation de l'ANSM, il y a chaque année en moyenne 2.529 "accidents thromboemboliques veineux" attribuables à la prise de la pilule, dont 778 cas liés à celles de 1e et 2e génération et 1.751 pour les 3 et 4e génération.
L'Agence estime que si les pilules de 3e et 4e génération n'étaient pas été prescrites en France, il y aurait neuf décès par an en moins et 1.167 accidents veineux de moins.
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Spécialiste de la défense des femmes victimes d'accidents liés à la pilule, Me Philippe Courtois a estimé que le chiffre d'accidents était "sous-évalué" et appelé à "suspendre" les ventes de pilules de 3 et 4e génération.
Chute des ventes
Le directeur de l'ANSM, Dominique Maraninchi a rappelé que l'Agence avait décidé d'encadrer plus strictement les prescriptions de ces contraceptifs qui, apparus dans les années 80/90 n'apportent, finalement, pas de bénéfices compensant le "sur-risque" de thrombose.
L'alerte lancée en janvier à la suite de la plainte d'une femme victime d'un accident vasculaire cérébral (AVC) imputé à une pilule de 3e génération a eu un impact important et rapide sur les chiffres des ventes de pilules, s'est félicité M. Maraninchi.
Les ventes de pilules de 3 et 4e génération (le terme "génération" fait référence à l'évolution dans la composition) ont chuté de 34% en février, tandis que celles de 1e et 2e génération ont grimpé de 27%.
La ministre de la Santé, Marisol Touraine, s'est "réjouie de constater que les recommandations étaient suivies" lors de la séance des questions au gouvernement à l'Assemblée nationale.
Autre médicament pointé du doigt par l'ANSM, le traitement anti-acné Diane 35 des laboratoires allemands Bayer a vu ses ventes s'effondrer de 62% en février sur un an.
Ce "mouvement de baisse des ventes, qui va s'amplifier dans les mois qui suivent", est une raison de se réjouir pour l'Agence, qui avait également lancé une alerte en janvier sur ce produit à l'usage détourné comme contraceptif.
L'ANSM a décidé de suspendre la vente de Diane 35 et de ses génériques (décision effective le 21 mai) et de demander là aussi une réévaluation de ce produit à l'Agence européenne.
Diane 35 : "Il faut "arrêter" de l'utiliser comme contraceptif"