En direct
A suivre

Bugarach peut retourner dans l'anonymat

Des personnes déguisées devant le pic de Bugarach le 21 décembre 2012 [Eric Cabanis / AFP] Des personnes déguisées devant le pic de Bugarach le 21 décembre 2012 [Eric Cabanis / AFP]

Le monde est toujours là et plutôt que d'une élévation au statut cosmique, Bugarach a accouché d'une souris en ce 21 décembre. Il pourra rechuter dans l'anonymat d'un petit village de l'Aude sans boulangerie et avec une agence postale ouverte seulement le matin.

Alors que la fin du monde n'a pas eu lieu, c'est pourtant un temps d'apocalypse qui balaye le village et son célèbre pic en cette nuit d'hiver. Des vents à dissuader même le plus déterminé des mystiques parcouraient le sommet du puech à plus de 90 km/h et des rafales de pluie s'abattaient sur les ruelles du village quasi désertes.

Après des mois de tapage médiatique, la localité subitement devenue célèbre dans le monde entier pour être l'un des endroits où il aurait fallu être pour échapper à l'apocalypse, semblait retrouver sa tranquillité. Jusqu'à la 184e fin du monde?

Des femmes déguisées en extraterrestres à Bugarach, le 21 décembre 2012 [Eric Cabanis / AFP]
Photo
ci-dessus
Des femmes déguisées en extraterrestres à Bugarach, le 21 décembre 2012
 

Le dispositif de sécurité mis en place par les autorités reste néanmoins en place: le préfet Eric Freysselinard a en effet pris le pari bien en amont de l'événement que la continuité du service de l'Etat survivrait au 21 décembre, en interdisant jusqu'à dimanche la montée au pic et en filtrant les accès au village.

Mais ce serviteur de l'Etat a assez montré, au cours des semaines écoulées, son incrédulité devant les prophéties qui faisaient de Bugarach et de son pic, point culminant du massif des Corbières avec ses 1.231 mètres, un endroit sacré, comme le professaient certains tenants de l'apocalypse, librement inspirés du calendrier maya.

Le maire Jean-Pierre Delord, qui avait tiré la sonnette d'alarme voici deux ans en rendant publiques ses craintes de voir débarquer des vagues de mystiques a été démenti. Les curieux n'ont pas afflué en masse dans les rues du village, où, au plus fort du (non) événement, un millier de personnes, dont 303 journalistes, étaient réunis.

"Le dispositif de sécurité a été efficace puisqu'il a dissuadé les foules de venir jusqu'à Bugarach", a constaté le préfet.

Sylvain Durif, un homme qui se présente comme le messager de Dieu et du Christ, à Bugarach, le 21 décembre 2012 [Eric Cabanis / AFP]
Photo
ci-dessus
Sylvain Durif, un homme qui se présente comme le messager de Dieu et du Christ, à Bugarach, le 21 décembre 2012
 

Quelques personnes ont été interpellées, des randonneurs refoulés et deux individus ont été contrôlés en possession de machettes et de masques à gaz. Le préfet voulait croire qu'ils avaient voulu "tester le dispositif et jouer avec les forces de l'ordre".

Dans les rues, l'ambiance était plutôt bon enfant vendredi. Certains avaient pris leur parti de l'exaspérante frénésie en se déguisant en petits hommes verts, imités par des membres du club de 2CV de Perpignan venus en visiteurs après avoir, à l'évidence, vidé leur cave à vin.

Des militants locaux de la Confédération paysanne ont profité de la surreprésentation journalistique pour faire campagne contre l'aéroport de Notre-Dames-des-Landes.

Un gendarme patrouille à Bugarach, au pied du pic du même nom, le 21 décembre 2012 [Eric Cabanis / AFP]
Photo
ci-dessus
Un gendarme patrouille à Bugarach, au pied du pic du même nom, le 21 décembre 2012
 

Puisque 200 Bugarachois n'auront pas à survivre dans un monde dévasté avec une meute de journalistes, ils devraient reprendre le cours de leur vie bouleversée: au pied du pic, autour de l'église, entre le restaurant et la ferme-auberge ouverts à la belle saison, sans boulangerie, sans épicerie, avec ses querelles sur l'implantation d'éoliennes et les petites histoires d'un village comme tant d'autres, qui n'a cessé de se dépeupler depuis le millier d'âmes du 19ème siècle.

Dans cette localité qui a voté à plus de 70% pour François Hollande, les néo-ruraux se partagent désormais l'espace avec la dizaine d'exploitants agricoles et les touristes attirés par les paysages somptueux, les orchidées sauvages, la colonie de vautours, la spéléologie et, pour certains, les légendes attachées au pays.

Ceux qui croient aux forces supérieures auront beau jeu de dire aux agnostiques: vous n'avez rien compris, il n'a jamais été question de fin du monde, mais de révélation.

 
 

Ce n'est "pas un cataclysme. La régénération s'accomplit pour tous, les énergies de la Vierge Marie et celles de Jésus sont là, au coeur du triangle sacré", dit Sylvain Urif, "Oriana" de son "nom cosmique", "découvreur de grottes énergétiques sacrées, médium et designer de soucoupes volantes".

À suivre aussi

Ailleurs sur le web

Dernières actualités