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Clichy-sous-Bois attend toujours de "tourner la page"

Des policiers devant des véhicules incendiés le 28 octobre 2005 à Clichy-sous-Bois. [Joel Saget / AFP/Archives] Des policiers devant des véhicules incendiés le 28 octobre 2005 à Clichy-sous-Bois. [Joel Saget / AFP/Archives]

Sept ans après la mort de Zyed et Bouna à l'issue d'une course-poursuite avec la police, qui avait embrasé les banlieues, Clichy-sous-Bois (Seine-Saint-Denis) espère un procès des policiers, espoir entre les mains de la Cour de cassation qui tranchera mercredi.

"Tout le monde a besoin de ce procès, nous les familles, les Clichois, tout le monde", a récemment déclaré Siyakha Traoré, frère aîné de Bouna, qui ne demande pas "la lune", mais "que la justice passe".

"Il y a eu tellement de rebondissements dans cette affaire qu'il faut toujours et encore espérer", renchérit Medhi Bigaderne, proche des familles et militant de l'association ACLEFEU (lire "Assez le feu"), née au lendemain des émeutes.

Zyed, 17 ans, et Bouna, 15 ans, avaient été électrocutés le 27 octobre 2005 dans un transformateur EDF où ils s'étaient réfugiés. Leur décès avait été le détonateur de violences parties du Chêne pointu à Clichy pour gagner l'ensemble des banlieues françaises durant trois semaines.

Une phrase, prononcée par l'un des policiers lors des échanges radio le soir des faits, est au coeur des débats : "S'ils rentrent sur le site EDF, je ne donne pas cher de leur peau." Mais les policiers ont bénéficié d'un non lieu contesté en Cassation par les familles de Zyed et Bouna. Le ministère public a demandé la confirmation de ce non lieu.

"Si la justice confirme le non-lieu, ça donnera le sentiment d'une justice à double vitesse, d'une justice de classe et d'une impunité envers la police", insiste Medhi Bigaderne, trentenaire, qui ajoute : "Les familles continueront à se battre pour que toute la lumière soit faite."

Au Chêne pointu, qui peine à sortir de l'insalubrité, Réda Al Agouz, mère de famille, demande "que justice soit rendue" pour "que la ville passe à autre chose une bonne fois pour toutes".

 

"La vie continue"

Nouveaux logements, inauguration d'un gymnase, d'un groupe scolaire... De lourds travaux ont été engagés. Mais la ville, touchée de plein fouet par la crise, peine à effacer les stigmates de 2005.

"Pour tourner la page, ça serait bien qu'il y ait un procès. Les jeunes (ayant pris part aux émeutes) ont été jugés, il faut que les policiers le soient aussi", estime Jimmy, sweat shirt gris et sac de cours sur l'épaule, devant le commissariat flambant neuf. Selon ce lycéen de 16 ans, les rapports avec la police sont "encore difficiles" mais la situation n'a "plus rien à voir" avec celle de 2005.

A une quinzaine de kilomètres de Paris, Clichy-sous-Bois compte 30.000 habitants dont 33 % d'étrangers de plus de 70 nationalités. C'est aussi la ville la plus jeune de France avec plus de la moitié de la population qui a moins de 25 ans. Le taux de chômage est de 22 % mais atteint 40 % chez les jeunes du Chêne pointu.

Pour le maire PS Olivier Klein, "un procès, quelle que soit son issue, aurait permis de mieux comprendre le déroulement des faits". "La lenteur de la procédure judiciaire fait que le drame revient dans l'actualité en permanence" mais "la vie dans la ville continue, malgré ce souvenir douloureux".

"Les jeunes concernés par les émeutes ont grandi, les mentalités ont évolué" mais une confirmation du non lieu "pourrait donner raison aux jeunes qui, il y a sept ans, s'en sont pris aux forces de l'ordre pour se faire entendre", observe Samir Mihi, de l'association "Au-delà des mots".

Une crainte partagée par Mohamed Mechmache, président de ACLEFEU : "Après ce qui s'est passé, on a dit aux jeunes qu'il fallait croire en la justice (...) Le risque, c'est qu'ils soient déçus".

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