La ville de Castres (Tarn) vient d'être le théâtre de violents incidents entre des parachutistes et des jeunes, qui ont coûté un oeil à un soldat et poussé le colonel à consigner ses hommes.
Une bataille rangée a opposé une soixantaine de soldats du 8e Régiment de parachutistes d'infanterie de marine (RPIMa) et de jeunes dans la nuit de vendredi à samedi, en marge d'une fête locale, a-t-on appris dimanche de source proche de l'enquête.
Les soldats ont été insultés aux cris de "sales militaires" ou "sales Français" à leur sortie d'un bar du centre, ont indiqué un haut officiel tarnais et le colonel Eric Chasboeuf, chef du corps du 8e RPIMa.
Selon ce dernier, les parachutistes, alors au nombre d'une dizaine, avaient eu le tort de défendre une jeune fille que des jeunes importunaient.
Les soldats se sont retrouvés devant l'établissement en présence d'un nombre beaucoup plus important de jeunes, qui avaient appelé du renfort. L'alcool aidant, les coups sont partis. D'autres militaires et d'autres jeunes sont arrivés à la rescousse. L'affrontement a tourné à la bagarre générale sur la grande place du centre-ville, tandis que les participants à la fête se réfugiaient où ils pouvaient.
Des policiers sont intervenus, tirant des balles en caoutchouc et utilisant des lacrymogènes pour séparer les opposants sans empêcher que des pugilats sporadiques continuent ailleurs.
"Un de mes jeunes a été blessé à l'oeil par un tesson de bouteille", a déclaré le colonel Chasboeuf à une correspondante de l'AFP. Hospitalisé à Toulouse, "il a perdu son oeil droit. Désormais à 21 ans, il ne peut plus exercer son métier, il ne sera plus parachutiste, plus militaire", a-t-il dit.
L'auteur présumé du coup de bouteille et un autre jeune ont été interpellés. Ils étaient présentés à un juge du pôle d'instruction de Toulouse dimanche en fin d'après-midi, a indiqué le parquet. Celui-ci a ouvert une information judiciaire criminelle pour violences avec arme ayant entraîné une invalidité permanente.
Connus de la police pour certains, les jeunes qui ont cherché querelle aux soldats constituent une "frange" avec laquelle la population, et pas seulement le RPIMa, a des problèmes, a précisé un responsable policier. Avec les parachutistes, ils trouvent à qui parler, d'autant plus que certains soldats ont eux-mêmes été des jeunes en difficulté, a-t-il poursuivi, en mettant en garde contre une vision "manichéenne" des événements.
La nuit des faits, des cadres du régiment ont fait le tour de la ville pour ramener les soldats. Pour éviter d'autres heurts, le colonel Chasboeuf a limité les quartiers libres dans la nuit de samedi à dimanche
Le régiment partait en manoeuvre dimanche, laissant 120 hommes en garnison, sur un effectif de 1.200. Les "consignes de prudence sont cependant maintenues", a indiqué le colonel Chasboeuf. La police, elle, prévoyait de conserver un dispositif renforcé dans la nuit de dimanche à lundi.
De tels incidents sont rares, a souligné le colonel: "Le 8 est un régiment très bien intégré dans la ville de Castres et compte dans ses rangs de nombreux jeunes issus de la diversité et de l'outre-mer. Nous voulons juste continuer à vivre sereinement et tranquillement dans notre ville de garnison".
La caserne du "8" avait été attaquée à la fin juin 2011 par une bande de jeunes armés, qui avaient essayé de forcer l'entrée et été repoussés. Selon des témoignages rapportés alors par le journal La Dépêche du Midi, cette attaque avait suivi une expédition menée par des individus à l'allure militaire contre un bar à chicha (pipe à eau).
Depuis 1951, le 8e RPIMa a participé à toutes les opérations militaires françaises en Indochine, Algérie et, plus récemment, en Irak, Bosnie-Herzégovine, Afghanistan et dans différents pays d'Afrique.